La libération de Pouilly par les Américains
On doit la libération du village aux soldats des 355 et 356 ème
régiment d'infanterie, sans oublier les pionniers du 314 ème génie.
L'ouvrage "History of the 89 th Division" nous renseigne sur les
opérations qui amenèrent à cette libération.
(George H. English, Jr , 1920,
216 et suivantes /511 )
La décision de traverser à Pouilly.
Quand le 05/11 la division eut atteint les bords de la rivière, le
général Wright décida provisoirement que la situation à Pouilly
présentait les meilleurs opportunités pour forcer le passage de la
rivière. D'autres réflexions et les rapports des reconnaissances,
confirmèrent cet opinion et il fut définitivement décidé de faire la
traversée à cet endroit.
Les préparatifs furent aussitôt commencés pour l'exécution de cette
décision.
Les considérations qui firent de Pouilly l'endroit de traversée sont
les suivantes :
Les autres villages comme Cesse, Luzy furent éliminés pour divers
raisons logistiques, ponts, ennemis en face etc.
Il ne restait plus qu'Inor et Pouilly. De bons ponts avaient existé
dans ces deux places et leurs démolitions n'avaient été que partielles.
Les positions ennemies étaient parallèles au cours de la Meuse, qui à
un point juste en dessous d'Inor court presque du sud au nord. Inor
cependant était exposé aux observations directes et au feu de toute la
ligne ennemie sur notre front.
Juste en dessous d'Inor, la rivière fait une courbe brusque vers le sud
ouest. Dans cette courbe s'étend la forêt de Jaulnay, couvrant
une arête plutôt élevée. Le long de cette étendue, la rivière coule
assez près de cette arête et les bords de la forêt et à peu près au
milieu se trouve Pouilly. Pouilly de ce fait était protégé des
observations et du feu direct, de toute part de la ligne ennemie,
s'étendant au sud des positions en face d'Inor. Donc un feu nourri
d'artillerie et de mitrailleuses qui était possible à Inor ne l'était
pas à Pouilly.
De surcroit nos reconnaissances poussées à Pouilly avaient été
couronnées
de succès, nous donnant une meilleure connaissance du terrain et nous
apprenant qu'il n'était pas aussi fermement défendu qu'à Inor. Il y
avait des
positions fortes, boisées en hauteur derrière Inor. qui dominaient la
traversée de la rivière.
A Pouilly la campagne sur la berge opposée était plus ouverte (and Hat
?). Et finalement les officiers du génie recommandèrent la traversée à
Pouilly d'un point de vue technique.
Le plan adopté par conséquent était la traversée en force près de
Pouilly.
Les reconnaissances et
préparatifs
"Les reconnaissances les plus intéressantes furent effectuées
par les soldats du génie, pour obtenir des informations concernant les
ponts et les traversées possibles.
Lors d'une de ces reconnaissances, le second lieutenant
Franck J.
Hoeynck, compagnie F du 314 ème du génie, avait été
instantanément tué
par un tir de mitrailleuse sur l'île juste au sud de Pouilly,
recevant deux balles dans la tête. Edward W. Dietz de la même
compagnie, qui l'accompagnait, blessé à la main resta
immobile derrière le corps de l'officier mort, la journée entière,
repérant la position de la mitrailleuse qui avait tué le
lieutenant. Il réussit à s'échapper dés l'obscurité arrivée. "
( Franck J.
Hoeynck avait été décoré de la DSC pour son action à Bantheville les 6
et 7 novembre)
"Les 5, 6 et 7 novembre le lieutenant Percy G. Forman du 314 ème génie
accompagné du deuxième classe Brewer, compagnie F du 314 ème, firent
des patrouilles intéressantes mais exposés au feu ami car pris pour des
ennemis."
"Le lieutenant colonel Somerwell avait décidé de faire une
reconnaissance. Avec deux éclaireurs il avance 500 mètres au delà
de nos postes avancés par les ponts de Pouilly. Cette reconnaissance
révèle qu'au lieu de deux bras de Meuse à Pouilly, comme les cartes
disponibles le montrent, c'est en, réalité trois bras de rivière à
traverser. Les précédents rapports sur les possibilités de traversée
étaient erronés (et le 314 ème génie dut rétablir le pont le
13/11/1918.) et ce que nos premières patrouilles avaient pris pour un
pont
intact, était en réalité une longue chaussée au dessus de la plaine
jusqu'au canal. (En fait la route entre l'écluse et la gare)
Plus loin une île faisait l'objet de deux ponts supplémentaires, qui
avaient été plus sévèrement démolis, mais demeuraient praticables
pour un homme en bonne forme physique.
Le lieutenant-colonel Somerwell, ne fit pas que les traverser, mais
vint au contact avec un détachement ennemi sur l'autre rive, les
mettant en échec lors de cette rencontre et réussissant à s'échapper
avec des informations de valeur sur l'état de ces ponts.
Plusieurs reconnaissances eurent lieu en traversant les ruines de ce
pont entre le 5 et le 11 novembre.
Le lieutenant-colonel Somerwell et le major Mark Hanna traversèrent à
différentes reprises et pénétrèrent dans Pouilly."
"Avant l'aube du 6 novembre, le major Mark Hanna entreprit une
reconnaissance personnelle du village de Pouilly. Traversant la rivière
sur le pont endommagé et en position précaire sur les portes de
l'écluse, il se glissa sans être vu dans le village et y demeura deux
heures.
Il vit beaucoup de soldats ennemis qui allaient et venaient sans
inquiétude dans le village pour leur repas et put entendre des femmes
qui leur faisaient la cuisine, parler allemand. Il fit des observations
intéressantes sur l'emplacement des mitrailleuses.
Le major Hanna repassa le pont en plein jour et on lui tira dessus
jusqu'à son passage des voies à plusieurs centaines de yards. Pendant
qu'il était dans la rue principale du village, à portée de voix des
soldats allemands qui semblaient si peu inquiets, ils ne notèrent pas
qu'il était un ennemi. La véritable audace de cet exploit semblait
l'avoir immunisé ! "
"Le matin du 6 novembre, le capitaine Harris retournait de ses
positions
au dessus d'Inor au quartier général du régiment. Sur son chemin il
rencontra un peloton de marines de la ? division sur notre gauche
et demanda à celui qui commandait où ils allaient. Il lui répondit que
ses ordres étaient de virer les boches du coin nord de la forêt de
Jaulnay. Le capitaine Harris lui dit que ce serait une mission bien
utile, comme son bataillon était dans le coin nord du bois à ce moment
là.
Plus loin le capitaine Harris rencontra une autre patrouille de marines
et s'enquit auprès de celui qui la commandait, des raisons de leur
présence dans le secteur de la 89 ème division. Le lieutenant répondit
qu'il avait été envoyé pour effectuer une patrouille dans Pouilly. "
"Dans l'après midi du 8 novembre, le colonel Allen du 306 ème RI reçut
l'ordre d'envoyer une patrouille de l'autre coté de la Meuse, quels
qu'en soient les risques pour reconnaître les prochaines places de
débarquement, s'assurer des dispositions de l'ennemi et faire des
prisonniers pour le renseignement.
L'utilisation de radeaux pour traverser fut envisagée. Mais il n'y
avait pas d'outil sous la main pour les construire.
Finalement pour l'exécution de cette mission, beaucoup de membres de la
patrouille prirent la décision de traverser en nageant. Tous étaient
volontaires et se lancèrent dans cet exploit. La rivière était large
de 150 à 200 pieds (45 à 60 mètres) avec un courant rapide. L'eau était
gelée, l'hiver était déjà là.
Les hommes qui osèrent cette traversée avait été 10 jours en combat
actif. Ils n'avaient que leurs vêtements sur le dos et même pas une
couverture pour s'envelopper à la sortie de l'eau. Ils savaient que si
ils survivaient aux périls
de la traversée, ils auraient probablement à combattre sur l'autre
rive, trempés et épuisés, un ennemi déterminé.
Dans le secteur du 1 er bataillon, le capitaine Schwinn décida
d'envoyer trois patrouilles de deux hommes chacune à différents points
de son secteur, chaque patrouille étant couverte par de petits
détachements
de fusiliers de ce coté du rivage. Parmi les six hommes qui se
lancèrent dans cette tentative deux réussirent et deux se noyèrent. Sur
la gauche du secteur, en un point à 500 mètres du sud de Létanne, le
sergent Waldo M. Hatler de la compagnie B, et le caporal John W.
Mcafee, compagnie D entrèrent dans le cours d'eau, pour le traverser à
la
nage. Avant d'atteindre la rive opposée, le caporal McAfee, frigorifié
et épuisé, coula.
En dépit de cela, le sergent Hatler poursuivit et gagna la rive
opposée, repéra les avant-postes ennemis, et se remit à l'eau pour
regagner à la nage son point de départ. Il fut tiré de l'eau souffrant
d'épuisement et d'hypothermie puis pris en charge par le poste de
secours
du régiment, après avoir rendu son rapport."
"Au centre du secteur, le lieutenant George S. Creaghe de la compagnie
A, et le lieutenant Hayes de la compagnie D, firent la tentative.
Après être entrés dans l'eau à l'embouchure de la Wame, un bateau
portant une patrouille allemande vint directement sur eux. Demeurant
immobiles et silencieux dans la rivière glacée, ils étaient contraints
de regarder la patrouille ennemie accoster et le bateau retourner sur
l'autre rive. Abandonnant cet endroit de la rivière, ils descendirent
plus loin pour essayer de nouveau, mais ils
furent confrontés à une sentinelle allemande sur la rive en face. "
Finalement ils durent abandonner.
"Sur le coté droit du secteur, plus près de Pouilly et proche de
l'embouchure de la Wame,qu'ils avaient suivie par erreur, pensant qu'il
s'agissait d'un autre cours d'eau qui se déversait plus haut dans la
Meuse, le sergent
Harold I. Johnston de la compagnie A, et le deuxième
classe
David B. Barkeley, de la même compagnie avait vaincu
la rivière.
Sur l'autre rive, Johnston avait rampé sur près de 150 yards en
s'éloignant de la berge sans être repéré par les avant-postes ennemis
des environs. Il s'était assuré de la nature des berges et trouvé
qu'elles étaient convenables pour un débarquement de troupes.
Sur le retour Barkeley succomba au froid et à l'effort et se noya, mais
Johnston réussit bien qu'épuisé à atteindre le rivage avec les
informations."
Pour ces exploits, Hatler, Johnston et Barkeley à titre posthume pour
ce dernier, reçurent la médaille d'honneur.
"Dans le secteur du 3 ème bataillon, quatre patrouilles furent
envoyées, mais deux d'entre elles durent rebrousser chemin sous le feu
d'une mitrailleuse de Pouilly, et une qui tentait la traversée sur un
radeau abandonna la tentative. La 4 ème qui tentait la traversée à la
nage n'y parvint pas.
Dans la nuit du 9 au 10, des pontons allemands pris à l'ennemi, avait
abordé près du 306 ème RI. L'un d'eux avait descendu la Wame et servait
au transport d'une patrouille de 22 hommes, sous les ordres du
lieutenant Heiken, qui firent avec succès une reconnaissance complète
aux alentours de Pouilly. Ils repérèrent un avant-poste ennemi
dans la boucle de la rivière en dessous de Pouilly et capturèrent
trois Allemands qui fournirent des informations
intéressantes.
Plus tard dans la périphérie de Pouilly une partie de la patrouille
rencontra une patrouille ennemie. Un des Allemands envoya une grenade à
main qui explosa sans faire de dégât. Nos hommes ripostèrent en tuant
deux hommes et blessant un troisième. Ils repartirent sans perte
humaine.
La nuit sur les 21/22 heures, le 355 ème RI entreprit de lancer des
patrouilles.
"Une patrouille de deux officiers et quatre hommes du 2 ème bataillon,
tous volontaires pour cette mission dangereuse, essayèrent de traverser
la rivière, une partie d'entre eux à la nage dans les environs de la
ferme de Pouilly (En fait Prouilly) à un kilomètre et demi en
amont de Pouilly. Les nageurs les plus en vue, furent accueillis
pendant qu'ils étaient dans l'eau, par le feu des mitrailleuses et les
grenades de la berge ennemie.
Le lieutenant Walther S. Yarbrough, commandant la patrouille et six
hommes furent soit tués par les tirs, noyés ou capturés, on ne sait
puisque
leurs corps n'ont jamais été retrouvés.
Les disparus sont : Le sergent Mack Christian, compagnie F, le caporal
Earenst C. Sexton, le sergent Victor C. Lee, le 2 ème classe Ole
Alendale, et le caporal Carl Heath , ces derniers appartenant à
la compagnie H.
Le 2 ème classe James V. Ponder de la compagnie G, fut capturé et
libéré après l'armistice. Il ne savait rien du sort de ses camarades
disparus.
Les autres membres de la patrouille, composée du lieutenant John H.
Davidson, du sergent Edward R. Winebar, du 2 ème classe Alfred Moen,
tous de la compagnie G, Le sergent Walther L. Lewis, les 2 ème classe
Onezie Suire, Georges Desseles, Robert C. Mcgill, Théodore Campbell et
Henry H. Becher, tous de la compagnie H, étant légèrement à l'arrière
des nageurs étaient repartis."
"A l'ouest d'Inor, une patrouille du 3ème bataillon sous les ordres du
lieutenant Colombus C. Beverage essaya de traverser à la nage, trainant
une corde grâce à laquelle ils espérait faire traverser le restant de
la patrouille. Le courant et l'eau froide eurent raison de leur
tentative. L'officier, le caporal Roscoe W. Grisham de la compagnie K,
Les 2ème classe H. F. Goettsch, Roma Brannan et James R. Cook de la
compagnie L, furent tirés de l'eau dans un état de faiblesse et de
semi-conscience.
Une troisième patrouille reconnut les ponts près de Stenay."
"Pendant cette période de préparation pour forcer le passage de la
Meuse, les soldats du génie, parmi d'autres activités, étaient engagés
dans la recherche et l'enlèvement de mines laissées par l'ennemi
déloyal et en retraite. Un détachement de deux sergents et de quatorze
hommes de la compagnie E, du 314 ème génie, firent sur deux jours,
l'examen des bâtiments, ponts et routes dans les environs de Cesse et
Laneuville etc."
La traversée de la Meuse
"La traversée de la Meuse près de Pouilly, fut effectuée en radeaux,
faits de pontons pris à l'ennemi sur un autre front. Le transport des
troupes fut confié au capitaine F. E. Dennie et sa compagnie C du 314
ème génie. Les pontons avaient été apportés dans l'après midi du 5
novembre, par un détachement du 503 ème sous le commandement du
capitaine McGeachin et furent parqués pour la nuit sur la route qui va
de Laneuville à Beaumont sur le flanc nord de la forêt de Dieulet et
soigneusement camouflés.
Après consultation du colonel Allen du 356 ème RI, le capitaine
Dennie décida de ne pas tenter la construction du pont en pontons pour
la première traversée, car ses hommes n'étaient pas familiarisés avec
le matériel allemand. Il fut décidé de construire des radeaux formés de
plusieurs pontons et faire traverser les hommes au moyen de câbles des
deux côtés.
Un ponton fut utilisé la nuit du 9 pour une patrouille et le bateau
revint avec 5 prisonniers.
L'ordre final pour la traversée arriva à 10:00. L'heure prévue pour la
traversée était 18:00. A cette heure et en cette saison, il ferait
noir. Les équipes étaient attelées à leurs wagons de pontons et
partirent de leur parc doucement vers 6:00. Ils étaient agrippés sur
leurs wagons le long de la route à travers la forêt, passant le bois de
la vache, jusqu'à un point près de l'endroit où un petit cours d'eau,
appelé Ruisseau de la Wame se jette dans la Meuse. Les bateaux furent
ensuite portés à bras et mis à l'eau dans la petite rivière à trois ou
quatre cents yards au dessus de l'embouchure et descendirent en
flottant. L'embouchure de la Wame est à peu près à un kilomètre et demi
en dessous de Pouilly et c'est à ce point qu'eut lieu la traversée.
Un radeau était fait de trois pontons en les plaçant cote à cote et en
les accrochant. Les pontons étant fait de métal, des planches furent
placés sur le dessus afin que les souliers à clous des soldats ne
fassent pas de bruit quand ils monteraient sur le ponton. Des cordes
étaient attachées aux deux extrémités de chacun des cotés des bateaux,
faisant en fait deux cordes à chaque extrémité du radeau.
Le premier fut complet à 19:45 et 16 pionniers et un détachement de
couverture de 22 hommes d'infanterie traversèrent. Quand les bateaux
furent déchargés, les cordes tirées les firent revenir. Le capitaine
Dennie avait traversé avec le premier bateau et accompagné le
détachement d'infanterie à leur position de couverture. Celui qui
commandait l'infanterie, émit un doute sur la possibilité de tenir la
position, mais le capitaine Dennie l'encouragea en lui faisant cette
remarque : "Si vous revenez vous me trouverez avec un revolver et
à
votre recherche".
Les pionniers avec le lieutenant Fournet à leur tête, étaient restés
sur la rive pour tirer et faire traverser le radeau.
L'infanterie commença à arriver à 20:30 et traversa sur ce radeau en
continu jusqu'à 22:00. Vingt cinq hommes étaient placés sur chaque
bateaux, soit 75 par radeau. Ainsi le 1er bataillon du 356 ème RI et
une partie du 3 ème bataillon furent sur l'autre rive en une heure et
demi.
Pendant que le premier pont fonctionnait, un second du même type était
lancé un peu plus loin au dessus de la Wame et fut opérationnel pour la
traversée des troupes à 21:30
Le lieutenant Welles avait la responsabilité de ce nouveau passage.
Vers les 2:00 du matin le 11 novembre ces radeaux avaient transporté le
reste du 3 ème bataillon du 356 ème.
Des détachements du bataillon de liaison, étaient passés avec
l'infanterie et avaient trouvé le moyen de faire traverser leurs fils
grâce à un vieux piquet de téléphone allemand.
Ainsi la traversée redoutée de la Meuse s'était faite sans perte de vie.
L'ennemi avait été berné par le soin apporté à cacher les pontons avant
leur
usage et par la ruse qui leur avait fait penser que la traversée serait
tentée à Pouilly même. Pendant qu'elle se faisait en dessous de
Pouilly, les pionniers couverts par un tir violent d'artillerie sur la
rivière au village, continuaient la construction de deux passerelles
pour piéton sur les ruines du vieux pont dans Pouilly. Les avant-postes
ennemis découvrirent ce chantier et ciblèrent sur lui le feu des
mitrailleuses et de l'artillerie, feu suffisamment violent pour stopper
le travail temporairement.
La traversée en cours ne fut pas connue de la garnison allemande
jusqu'à ce que le village fut entouré et notre position sécurisée sur
les hauteurs alentours. Le village fut investi par l'arrière et il fut
fait plus de
cent prisonniers.
L'ennemi avait été dupé dans cette opération, par le comportement de
l'artillerie. Avant le 9 novembre, Les artilleurs n'avaient pas tiré
sur les villages à l'est de la rivière, comme ils les savaient occupés
par des femmes et des enfants français. Il était évident cependant que
ces villages représentaient un abri pour l'ennemi et seraient sous le
feu
si nos troupes venaient à les investir.
Aussi le général Wright s'arrangea avec l'aviation pour prévenir les
habitants que les villages pourraient être bombardés à partir du 9
novembre. Ce soir là, en conséquence, les villages à l'est de la
rivière furent vivement bombardés. Le soir du 10 novembre, alors que la
traversée était en route, ce bombardement recommença. La garnison
allemande de Pouilly apparemment se réfugia dans les caves, croyant que
ce bombardement n'était que la répétition de celui de la nuit
précédente. et de ce fait ne s'aperçut pas de la traversée."
"Nous allons maintenant voir les opérations du 178 ème RI sur la Meuse.
La brigade était sous le commandement du général Hermann Hall, qui
avait succédé au général Hanson qui commandait le 9. Le quartier
général était dans un ancien camp-prison allemand situé à la ferme de
Pont Gaudron, sur la route de Laneuville-Beaumont près des passages sur
la Wame.
Bien que l'heure indiquée pour le début des opérations fut 16:00, le
général Hall avait été averti par la brigade des marines de la 2ème
division sur notre gauche, qu'ils ne commenceraient pas la progression
vers la rivière avant 21:30, et il avait revu ses plans en conséquence.
Le feu destructeur d'artillerie commença sur le village de Pouilly,
incluant le secteur gauche de la division à 21:30. Ce feu fut suivi par
un tir de barrage. Sous ses abris, le premier bataillon du 356 ème RI,
commandé par le capitaine Ray K. Puffer, avança rapidement à 21:30. Ce
bataillon était suivi par le (?) du 356 RI, commandé par le
capitaine Dale D. Ernsberger, et le 3ème bataillon du 355 RI sous les
ordres du major (puis capitaine) John F. Symes. Chaque bataillon était
accompagné par une compagnie de mitrailleuses. Le but
était de gagner les hauteurs au dessus de Pouilly et d'Inor.
Marchant à la boussole, mais ne rencontrant pas de résistance cette
nuit là, le bataillon du capitaine Puffer avait à minuit atteint le
haut de la colline au nord-est de Pouilly et avait formé une ligne
s'étendant de la rivière à la limite de la division. Cette limite
courait de Létanne exclus à Autreville inclus, parallèlement à
l'étendue sud ouest de la Meuse à une distance d'un peu moins de deux
kilomètres.
A 6;00 le matin du 11 novembre, ce bataillon s'était avancé au bois de
la
Hache, avec reconnaissance d'une partie du bois de Soiry, bien au
dessus
vers la campagne au nord de la Meuse.
A 8:00 une compagnie qui avait été détachée du 3 ème bataillon
du 356 RI, occupa Autreville et le sommet de la colline à l'ouest de ce
village. La matinée était brumeuse et maussade. Les troupes avaient
atteint leur objectif et s'engageait au nettoyage du coin et de ses
environs.
A 8:55 un télégramme arrivait au quartier général annonçant qu'un
armistice avait été accepté et que les hostilités devraient cesser à
11:00.
L'ordre avait été envoyé à la troupe aussitôt, mais les éléments hors
des lignes ne pouvaient être avertis avant ces onze heurs et certains
parmi eux étaient toujours au combat à midi.
Pierre Vermeren (Ancien élève de l'École normale supérieure, agrégé et
docteur en histoire) écrit :
"La date de l'armistice était connue depuis quatre jours, et l'heure de
l'armistice depuis
5 heures du matin, parfois plus tardivement. À Inor (Meuse), le colonel
Allen de la 356e compagnie d'infanterie américaine, à la poursuite
d'unités allemandes, n'a reçu les ordres qu'à 11 heures 40, et le
commandant
du 3e bataillon plus en avant, qu'à 12 h 15. Car l'armistice a
trouvé les 89e et 90e divisions de l'armée américaine en pleine
offensive dans
le secteur Meuse-Argonne, engagées dans la bataille de Stenay: le but
était de
traverser la Meuse coûte que coûte avant l'armistice."
Voici une autre version issue de l'ouvrage "Infantry in battle"
1939 page 108-113 (en anglais)
Le 7 Novembre
1918, le 356e d'infanterie US atteint la Meuse, dont la rive est tenue
fermement par les Allemands.
Le colonel RH Allen, le commandant du régiment, avait reçu l'ordre de
préparer un plan pour effectuer la traversée.
Le colonel Allen, en accord avec le génie, a donc choisi un point de
passage.
Son plan était fondé principalement sur la surprise. Six pontons
allemands capturés (empruntés sans permission à la 2ème division
devaient être utilisés).
La traversée devait être faite la nuit juste à l'ouest de l'embouchure
de la Wame.
Un détachement de vingt-cinq hommes irait en premier et se déploierait
dans la courbe de la rivière pour arrêter les patrouilles ennemies.
Immédiatement après, le 1er Bataillon devait traverser et aller de
l'avant en silence, les fusils déchargés.
Ils devaient passer au nord de Pouilly, couper les lignes menant au
village, puis s'emparer des hauteurs à l'est de celui-ci.
Plus tard, ce bataillon poursuivrait au coin le plus élevé du bois de
Soiry.
Le 3e Bataillon suivrait le 1er, contournerait Pouilly et progresserait
vers le Bois de la Hache.
En passant par Pouilly, il laisserait une compagnie pour organiser la
résistance dans le village.
L'artillerie préparerait un tir nourri synchronisé et calculé devant
l'infanterie. Le feu ne devait commencer que sur réception des ordres
ou sur signal d'une fusée du commandement du régiment à la ferme de la
Wame.
Si le feu n'avait pas commencé au moment où 1er Bataillon atteindrait
le chemin de la ferme de saint Remy à Pouilly, l'artillerie l'ouvrirait
sur le signal de ce bataillon.
Des dispositions similaires avaient été prises pour les mitrailleuses
et autres canons de garder le silence jusqu'à ce que l'artillerie
commence.
La rivière était peu profonde à cet endroit et l'ennemi de toute
évidence s'attendait à une attaque, ayant constaté une tentative
de construire des radeaux prés de ce village pour traverser.
Les Allemands avaient noté ces préparatifs et avaient entendu les coups
de marteau.
Au moindre mouvement dans le voisinage ils ouvriraient le feu.
Le bois pour les radeaux était empilé près de la forêt de Jaulnay et
imparfaitement camouflé.
Chaque nuit des hommes étaient détachés pour les assembler dans une
carrière près de Pouilly.
Pour le principal point de passage, les bateaux devaient être attachés
ensemble par trois faisant ainsi deux radeaux de six pontons. Ces
radeaux devaient être tirés sur la rivière par des cordes tenues au
rivage par des éléments du 314 ème Génie. Du foin et des planches
avaient
été placées dans les bateaux métalliques pour amortir le bruit des
souliers ferrés.
Aucun ordre ne devait être donné. Le silence absolu était de rigueur.
Les ingénieurs avaient organisé les communications à travers le fleuve.
Un fil de téléphone léger avait été fixé à chaque extrémité des
radeaux. Une forte secousse sur le fil serait le signal pour le départ
du radeau.
Les pontons devaient être transportés de l'embouchure de la Wame et
descendre la Meuse.
Les commandants de bataillons et compagnies avaient reçu le plan
détaillé le 09/11/1918 mais personne d'autre n'en avait parlé jusqu'à
son exécution.
Certains changements avaient été ordonnés par la division, mais suite
aux protestations du colonel Allen, ils avaient été réduite au minimum.
Par exemple, la division a ordonné une préparation d'artillerie, mais
le commandant du régiment a estimé que ce serait supprimer l'effet de
surprise. Il a protesté et le plan original pour le soutien de
l'artillerie a été abandonné.
La traversée a dû être reportée dans la nuit du 10.
L'intervention sur Pouilly a réussi au-delà de toute attente.
Pratiquement toute l'artillerie ennemie à proximité a été placée sous
son feu .
Les premières troupes ont été transportées vers 20:20
Peu de temps après, l'artillerie allemande a tiré à proximité, après
quoi le colonel Allen a ordonné le tir de la fusée et l'artillerie et
les mitrailleuses américaines ont ouvert le feu.
En quelques minutes, l'ennemi a déplacé son feu d'artillerie dans la
région de Pouilly et depuis lors pas un autre obus n'est tombé près du
point de passage.
La traversée continua, selon le plan, et fut un succès.
Beaucoup de prisonniers ont été faits à Pouilly et Autreville. Toute
une compagnie de mitrailleuses a été capturée.
Le 1er Bataillon, se déplaçant dans l'obscurité et le brouillard,
accéda à son objectif à la boussole.
Ce bataillon et le 3ème, qui le suivait, ont subi quelques pertes.
L'ennemi a été pris complètement par surprise.
Le sort du 2e Bataillon de ce régiment est différent. Il avait reçu
l'ordre de passer sur une passerelle où la 2e division traversait. Il
atteint le pont désigné à 21h00, mais dût attendre jusqu'à 01h00 avant
de pouvoir s'y engager.
L'ennemi découvrit le mouvement. Son artillerie vint frapper avec une
précision mortelle sur le passage du 2e Bataillon.
La plupart de ses officiers, y compris son commandant, ont été tués ou
blessés, et 232 hommes sur les 600 qui commencèrent l'opération
subirent le même sort.
Le plan du colonel Allen était basé sur la surprise, et la surprise a
réussi comme presque toujours.
Les Allemands s'attendaient à une traversée au niveau de Pouilly et le
commandant du régiment a pris grand soin de les encourager dans cette
croyance.
Pendant plusieurs jours, il a favorisé cette idée.
La construction de radeaux à proximité, le camouflage imparfait du
bois, la menace d'un passage précédent, le martèlement de nuit sur des
planches près de Pouilly, tout a confirmé les Allemands dans leur
certitude.
En outre, puisque le secret était la base de l'opération, le colonel
s'opposa fermement aux volontés de la division d'une préparation
d'artillerie avant le passage. Son point de vue a prévalu.
La somme de toutes ces précautions amena le Ier et 3e Bataillons à
attaquer d'une manière inattendue en un endroit inattendu. Les
Allemands n'étaient même pas sûrs que la traversée ait été effectuée !
Que la surprise ait été complète est clairement démontré par le fait
que
pratiquement aucun des tirs d'artillerie n'est tombé au point de la
traversée réelle, alors que la zone Pouilly a été pilonnée sans pitié
pendant toute l'opération.
L'effet désastreux de l'absence de surprise sur les listes des victimes
est singulièrement illustré par l'expérience de la 2e Bataillon, qui a
perdu près de la moitié de ses hommes en traversant ce même fleuve.
L'ouvrage "History of the 89th division" (George H. English, Jr , 1920,
216 et suivantes /511 ) nous relate aussi cette traversée de la Meuse.
"Le lendemain matin, 10 novembre, la compagnie C, du 314 ème génie, fut
informée que la traversée de la Meuse par les troupes aurait lieu cette
nuit là.
Toute la compagnie quitta Tailly pour la forêt de Jaulnay le 10
novembre et y arriva vers 16:30.
Avant de quitter Tailly des dispositions avaient été prises pour
disposer d'assez de mulets et de chevaux pour transporter les pontons
jusqu'à la rivière. A peine arrivé dans la forêt de Jaulnay, ordre
avait été donné aux équipages d'atteler aussitôt.
Le lieutenant Shifrin apprenait du major Rader du 1 er bataillon du du
314 ème génie, que l'heure H était 18:00 et qu'il serait nécessaire de
traverser la rivière aussitôt après.
La compagnie C restait sur la rive nord pour faire traverser les
radeaux en les tirant.
L'infanterie arriva à 20:30 et la traversée dura jusque 22:00.
25 hommes étaient placés dans chacun des 75 bateaux.
En une heure et demie, le premier bataillon en entier et une petite
partie du 3 ème du 356 ème RI traversèrent sans encombre.
Un arrêt survint à ce moment là car le restant du 3 ème bataillon du
356 ème RI s'était égaré.
Pendant que le premier pont (de bateaux) était en service un second fut
construit sous les ordres du Capitaine Dennie et du lieutenant Pike.
Ce pont établi un peu en amont du premier près de la passerelle du
ruisseau était opérationnel vers 21:00 pour faire traverser
l'infanterie. Le lieutenant Welles de la compagnie C était en charge
des problèmes du génie sur la rive nord.
Durant la trêve, pendant qu'on attendait que les troupes arrivent,
plusieurs transports de blessés eurent lieu par le premier pont.
Vers 11:30 les troupes commencèrent de nouveau à arriver et les deux
ponts en activité permirent aux troupes du 356 et 355 ème RI de
traverser.
Ce mouvement s'est poursuivi jusque environ 2:00 du matin le
11/11/1918 après quoi le trafic s'allégea.
Les hommes restèrent dehors toute la nuit manœuvrant les radeaux chaque
fois qu'il était nécessaire".
Une carte plus détaillée nous montre la scène des opérations des 355 et
356 ème RI.
Une lettre d'un soldat à sa famille du 27/11/1918 relate cette
traversée de nuit :
"Eh bien c'était terrifiant ! De la boue jusqu'au genoux dans les
chemins. La grippe renvoyant les plus costauds à l'arrière, mais nous
avons continué à aller de l'avant et obligé Heinie (l 'Allemand) à
courir jusqu'à l'acculer à la Meuse où il fit sauter tous les ponts, si
bien que nous avons dû attendre quelques jours jusqu'à ce que le génie
puisse construire des ponts de radeaux et alors nous rampâmes vers la
rivière dans l'obscurité. Les hommes du génie nageaient dans l'eau
glacée, attachant ce pont fragile sur l'autre rive. Puis le téléphone
des avant-postes des Fritz fonctionna et les mitrailleuses
ennemies à l'affut et l'artillerie se mirent en route dans une grêle
d'acier et de plomb, telle que je n'en avais jamais vue auparavant,
mais nous l'avons surmonté".
Pierre Vermeren dans le Figaro
du 09/11/2018, résume les combats qui eurent lieu dans notre région. Le
titre "Ces Américains sacrifiés le 11 Novembre à la bataille de Stenay"
est un peu réducteur puisque c'est toute notre contrée qui fut prise
dans cette bataille.
Il écrit :
"Le 10 novembre, les Américains lancent une double offensive. La
90e, aux
portes sud de Stenay, engage l'offensive dans le quartier industriel et
militaire. Son onzième bataillon lance l'assaut après un pilonnage
d'artillerie,
épaulé par un second bataillon avec 130 hommes rescapés. On
dénombre
57 Allemands tués et 17 faits prisonniers. Mais le bilan est lourd
chez les
Américains: 24 tués, 83 blessés et 3 disparus. Un déluge
de feu
et d'obus tombe alors sur les Américains obligés de s'enterrer. Il est
impossible d'entrer dans la ville, et plus encore de passer la Meuse
pour la
89e.
Wright met en œuvre son plan: il fait passer la Meuse à Pouilly et Létanne au
nord. Le 10 novembre, la 356e compagnie d'infanterie, épaulée
par la
314e du génie, franchit la Meuse. Puis, dans la nuit du 10 au 11, c'est
au tour
de la 355e. Mais les Allemands qui ont miné le fleuve glacé dans lequel
se
noient des Américains, les attendent avec des mitrailleuses. C'est
l'hécatombe.
Des dizaines d'hommes d'une compagnie entière, avec tous leurs
officiers et
sous-officiers, dont le commandant du bataillon Carlson, sont tués. La
tuerie se
poursuit jusqu'au matin (vraisemblablement 61 tués et 300 blessés
américains).
Mais le fleuve est traversé, les mitrailleuses détruites, et la
poursuite
s'engage: jusqu'à 12 h 15 à Inor, le village suivant.".
Je ne connais pas les sources de M Vermeren concernant le nombre de
tués et blessés.
Enfin, trouvé aux USA un film où
l'on voit Pouilly libéré.
Cependant tout ne concerne pas notre village.