Gobert Jean Baptiste

Il est né
le 02/08/1849 à Pouilly-sur-Meuse, fils d'Alphonse Gobert, menuisier
(1811-1881) et Marie jeanne Lamotte (1823-1904).
On trouve aux AD08, dans la "Liste du contingent départemental de la
garde mobile nationale : Meuse 1869 1R009 35/89", sa description
physique :
Cheveux et sourcils châtains, yeux bleus, front large, nez et bouche de
taille moyenne, menton large, visage plein, teint coloré et il culmine
à
1 mètre 69.
Très jeune il part en Belgique (à Verviers) où il réussit dans le
commerce de la
draperie et de la confection après s'être associé à Pierre Nicolas
Labbé (1843 à Noers - 1909 Spa)
Son premier magasin date de 1873.
En 1881, il est déclarant au décès de son père Alphonse, le 20
décembre.
Il y est dit "négociant domicilié à Verviers...". (AD55 1873-1882
158/177).
Le
06/06/1882, il épouse Lucia Martin (1861-1946), fille de François Félix
Martin (1832-1909),
directeur des
magasins Thiery de Bruxelles, de Mons et de Saint-Ghislain et de Elvire
Adolphine Berthe (ca 1840-1875). (Transcription du mariage, AD55
1883-1892 100/185).
Suite à une mésentente avec un de ses clients, Mr Armand Esders, qui
ouvre un
magasin à Paris, et ne se fournit plus chez lui, il décide de faire de
même et crée les Magasins Réaumur.
Pour ce faire, il acquiert un pâté de maison dans la rue du même nom,
qui venait d'être percée en 1894.
La construction du magasin commence en 1896. Il est inauguré le
17/04/1897 par le
président Félix Faure.
Ses affaires marchent si bien qu'il faut réguler l'entrée des clients
devant l'établissement.
Le journal "L'écho de Paris" du 24/03/1900 page 3/4 annonce
l'inauguration des agrandissements considérables du magasin. On y
apprend aussi que notre Gobert fait partie de "l'association Meusienne"
et qu'il recevra avec empressement tous ceux de nos compatriotes.
Les produits étaient de qualité, les prix attractifs et le personnel
compétent.
Personnel encadré par des Lorrains dont il connaissait le sérieux de
par son origine.
Ma grand-mère, Thérèse Berthelemy (1898-1970), y a travaillé.
Notre Gobert a aussi un sens développé de la communication. Les
articles élogieux parus dans "Le Public" du 23/07/1903, "Le Moniteur
Universel" du 03/04/1914, semblent dictés par un égo assez bien
dimensionné !
En voici un extrait : "On peut donc dire qu'il est vraiment le fils
glorieux de ses œuvres, qu'il s'est fait tout seul pour parler comme
les braves gens... Le cercleux le plus fashionable peut en effet s'y
vêtir en toute sécurité ; et l'employé et le bourgeois peuvent être
assurés d'y recueillir aussi cette grâce de la coupe sans laquelle
Lauzun lui-même eut paru emprunté...".
La confection des articles d'habillement était assurée par des ateliers
basés à Paris, Arras, Lille et Montluçon, appartenant au groupe.
Mais il semble que les employés étaient bien peu payés à en juger par
la grève des "Midinettes" relatée par le journal 'L'Humanité" des 2, 7,
13, 23 septembre 1910 mais aussi par les journaux "Le Journal", "Le
Soir", "Le Figaro" du 02/09/1910 etc.
Même "L'action française", journal royaliste, nationaliste et d'extrême
droite s'en fait l'écho, allant jusqu'à écrire, sans pour autant
condamner, ce mouvement de grève :
"Aussitôt midinettes et militants accouraient, et avec ensemble, l'on
conspuait Réaumur où l'on chantait .
Gobert, si tu continues
De tes bons clients, il n't'en restera guère
Gobert si tu continues
De tes bons clients, il n't'en restera plus."
Gobert fait appel à la force publique pour disperser les grévistes.
La grève dura 45 jours jusqu'au 08/10/1910. Gobert n'a rien cédé comme
l'écrit "L'Humanité" du 09/10/1910 : "M. Gobert aura pu vaincre la
résistance des midinettes, il n'aura pas vaincu la classe ouvrière". Ce
même journal appelle au boycott du magasin "A Réaumur".
Déjà en 1906, le directeur de "A Réaumur" avait refusé d'appliquer la
loi sur le repos hebdomadaire. Le journal "La Lanterne" du 18/09/1906
page 1/4, raconte la manifestation des employés de commerce devant lson
domicile.
La surface initiale du magasin de 1000 m² fut portée à 2500 en 1900 et
à plus de 6000 en 1928. Mais ce fut par son épouse, puisqu'il était
décédé depuis 1921
Les journaux "La Liberté" 10/03/1928, "L'intransigeant" 04/03/1928, "La
Patrie" 13/03/1928, "Le Quotidien" 04/03/1928 etc. relatent l'évènement
dans le même article dithyrambique et publicitaire. Le titre prête à
sourire : "Les Métamorphoses de Paris - Un miracle moderne... sur la
cour des miracles".
(Cet agrandissement du magasin a en effet rayé le quartier de la
fameuse cour des miracles.)
Le magasin se lança aussi dans la vente par correspondance, une méthode
inconnue jusqu'alors.
Il fut distingué lors de l'exposition universelle de 1900.

Gobert Jean-Baptiste
reçut la légion d'honneur (cote LH/1157/26 base
Léonore) le 23/07/1908, le mérite agricole et d'autres décorations,
dont celle de l'ordre de Léopold II comme officier.
La base Leonore nous
apprend :
"Etabli depuis 1870 à Verviers, il s'est acquis une situation
prééminente, par son travail et sa haute honorabilité dans la colonie
(sic)
française. Il rend d'inappréciables services à notre commerce
etc.".
Laïus habituel pour ce genre de décoration.
Lui même écrit : "Etabli en Belgique à Verviers comme négociant en
tissus depuis 35 ans où je fais 20 millions d'affaires par an, avec des
employés français.
J'ai fondé dans les principaux pays de l'Europe des maisons de commerce
où j'occupe des employés français dont plusieurs ont de brillantes
positions".
"En 1870, tiré au sort pour accomplir son devoir militaire, il s'était
fait remplacer (moyennant finances bien sûr) le 27/07/1870, par
François
Gaspard, né le 25/07/1849 à Lhopital, en Moselle. (AD08 1 R 008 1869
Liste
du contingent Meuse 12/42).
Cependant quand la guerre fut déclarée, il s'enrôla volontairement dans
les "mobiles" et resta à Montmédy jusqu'à la fin de cette guerre.
Mais dans son dossier militaire, rien n'indique qu'il ait été
volontaire. Il est affecté au 131ème RI, 4ème bataillon à Verdun.
Il participe à la guerre 1870-1871. Il est licencié le 31/12/1872, (la
France est occupée), et passe dans l'armée territoriale où il est
inscrit le 01/01/1873.
Le 06/09/1876, il est dispensé d'appel en temps de paix, dispense
renouvelée pour un an le 03/09/1878.
Il est dégagé définitivement de ses obligations militaires le
01/07/1895.
Par contre il est bien passé à la place forte de Montmédy, au 45ème
régiment territorial d'infanterie. (no 12592 classe 1869).
Il est décédé le 24/12/1921 à son domicile 82 rue Réaumur et enterré à
Lieusaint.
Son épouse Lucia prend alors le relai, et à son
décès en 1946, la famille Secordel-Martin et ce jusqu'à leur fermeture
en
1961.
Le magasin possédait alors des succursales à Metz, Nantes et Briey.
Mais aussi des points de vente, dont la maison Noël au Havre, en
parenté
également avec notre Gobert Jean-Baptiste.
En effet, sa soeur Marie Hermence Gobert se marie le 2703/1871 à
Pouilly avec Brice Jules Gobert. Le couple a Marie Julie Jeanne Berthe
(1874-1945) qui épouse François Xavier Marcel Noël 1869-1921 le
04/07/1899 à Pouilly.
On peut supposer que l'esprit de famille a joué et permis
l'établissement des Noël dans la suite des Réaumur...
Voici ci-dessous les liens de parenté que j'entretiens avec cette
personne et son acte de naissance.
Les
qualités de Gobert sont certaines : visionnaire, fin stratège,
opportuniste etc.
On conserve de lui l'image d'un grand patron en oubliant ce qu"était un
grand patron du début du XXe...
Cette analyse de l'enfant du pays, ira sans doute à l'encontre de
l'appréciation de certains, mais les journaux de tout bord, ont relaté
les faits.
Parmi ses exploits le principal fut sans doute de s'allier avec la
famille Martin, qui en Belgique gérait déjà
quasiment un empire.
Martin Lucia Marie Eugénie.

Lucia est née le 12/01/1861 à Saint-Ghislain (Hainaut). Elle
est la fille de Félix François Martin de Morfontaine, directeur des
magasins Thiery de Bruxelles.
Elle est également la nièce du baron Thiery et de M. Sigrand,
dont on connait les magasins "Thiery et Sigrand", puis "Armand Thiery",
mais aussi de Martin Michel (magasin Michel, place Maubert à Paris).
Sa sœur Bertha, épouse Jean Secordel, directeur de "L'épicerie
centrale" de Bruxelles, dont les fils qu'elle adoptera au décès de
Jean, prendront la direction des magasins Réaumur en 1946.
On voit que notre Gobert arriva donc dans une famille déjà
bien installée.
Au décès de ce dernier elle prend la direction du magasin.
En 1931 la SARL se transforme en SA plaçant 43 000 actions de 1 000
francs représentant le capital. Le journal "Le Petit Bleu de Paris" du
18/03/1931 se demande si les souscripteurs ont fait une bonne affaire...
Elle reçut la légion d'honneur le 31/10/1938 (cote 19800035/392/52496
base Léonore) des mains de Georges Secordel, chevalier lui aussi, et
administrateur des "Grands magasins Réaumur".
En plus de ses activités commerciales, elle participe à l'Exposition
des arts décoratifs en 1925 où elle reçoit la médaille d'argent, puis
le diplôme d'honneur à l'Exposition coloniale de 1931.
Elle créa une fondation destinée à recevoir ses employés malades ou
âgés, institua une caisse de retraite complémentaire pour ses salariés.
Elle créa plusieurs maisons destinées à venir en aide aux déshérités
portant son nom, finança le "Home Gobert-Martin" à Verviers (Belgique)
etc.
Elle est décédée le 14/08/1946 à Lieusaint, en région parisienne où
elle
possédait le "château de la Barrière".
Ci-dessous, l'acte de décès de Lucia Martin.