La guerre de trente ans et ses conséquences en Lorraine.
La guerre de 30 ans (1618-1648) est née en Bohême, de
l'antagonisme entre l'alliance des princes allemands protestants et
l'autorité impériale catholique, représentée par l'empereur Ferdinand II.
Ce conflit local prit une ampleur européenne quand s'y joignirent les
grandes puissances du nord, Danemark et Suède, soutenues financièrement
par la France travaillant à l'abaissement des Habsbourg.
En effet la France se sentait prise en tenaille par l'Espagne au sud,
la Franche Comté à l'est et le Pays Bas au nord, sans compter quelques
possessions espagnoles en Italie.
Si l'empire sortait victorieux de cette guerre, il était à craindre que
par solidarité familiale, il ne s'alliât contre les intérêts français.
L'abaissement de l'empire était donc jugé comme une nécessité par Richelieu et Louis XIII
La France n'entra en conflit ouvert qu'en 1634 en attaquant l'Espagne, elle même en conflit avec les Pays Bas.
Pourquoi si tard ?
Simplement parce que Louis XIII avait déjà à résoudre ses problèmes
internes avec les Huguenots et que les caisses de l'état étaient vides.
Mais déjà en 1627, il avait dû intervenir en Italie à propos de
l'héritage qui revenait à Charles de Gonzague, duc de Nevers, donc
prince Français, que contestait Ferdinand II et le duc de Savoie.
L'empereur ayant d'autres soucis préféra négocier et Charles de
Gonzague récupéra son bien. (Ce Charles de Gonzague (1609-1631)
est le fils du fondateur de Charleville dans les Ardennes.)
"Richelieu d'autre part s'efforçait d'assurer à la France un accès au Rhin afin d'avoir ainsi une ouverture sur l'Allemagne.
Aux confins orientaux du royaume, la route du Rhin se trouvait en
grande partie sous le contrôle du duc de Lorraine. Mais la route
stratégique espagnole qui unissait la Franche-Comté aux Pays-Bas,
traversait également les possessions du duc. Le statut du
duché de Lorraine était assez ambigu. Depuis
1542
sous l'autorité du duc, la Lorraine avait été reconnue comme un pays
libre et "non incorporable", mais ces différentes
composantes territoriales relevaient les unes du royaume de France, les
autres de l'empire, ce qui faisait du duché une cause permanente de
conflits entre ces deux souverainetés.
Depuis
1552,
les trois évêchés de Metz, Toul et Verdun, et leurs dépendances, qui
relevaient du Saint Empire, étaient occupées par des garnisons
françaises. La Châtellenie de Vaucouleurs, elle, était sous
souveraineté française depuis le XIVe siècle. Le duché de bar, uni au
duché de Lorraine depuis
1431, était pour sa part occidentale, Le Barrois mouvant, un fief de la couronne de France.
Le duc de Lorraine en tant que duc de Bar, était donc tenu de prêter hommage au roi de France pour ce Barrois mouvant.
Le duché de Lorraine ainsi que le Barrois non mouvant, relevait de la
seule autorité du duc Charles IV qui, en 1624 avait succédé à son oncle
Henri II. "
Henry Bogdan résume ainsi la
situation de la Lorraine dont le duc Charles IV resta fidèle à l'Empire. "La guerre de trente ans" Tempus Isbn 978-2-262-02397-3
De victoires en revers, d'alliances en trahisons, de traités en trêves
tout aussi précaires etc. l'Europe et particulièrement les pays
germaniques n'en pouvaient plus et aspiraient à la paix, fussent au
prix de concessions importantes.
Les pourparlers commencés en 1644 n'aboutirent qu'en
1648 par la paix
dite de Westphalie, mais en fait signée à Munster pour les catholiques
et à Osnabrück pour les protestants.
Car n'oublions pas qu' initialement cette guerre était d'origine religieuse et commencée en Bohême.
Elle finit par être politique et hégémonique entre les Habsbourg d'Autriche et d'Espagne et la France.
Cette première guerre européenne, tant par sa durée que par sa violence, fut le ferment de bien des rancœurs.
L'Allemagne et la Lorraine mirent des décennies à se relever.
Seules l'Angleterre (toujours opportuniste) et la Russie ne bougèrent pas.
Mais si le traité de Westphalie mit fin à cette guerre de 30 ans, la
France n'en avait pas fini pour autant avec l'Espagne et les combats ne cessèrent qu'en
1659 par le traité des Pyrénées, mettant ainsi fin à 27 ans de conflit.
L' Europe se trouva modifiée géographiquement et démographiquement.
Si dans notre région il n'y eut pas de bataille mémorable, toute la
misère que nos ancêtres connurent vint des passages incessants des
troupes amies ou ennemies.
Les soldats, mercenaires souvent mal payés, vivent sur le pays.
Don Ganneron (ca 1590-1668) raconte le passage du régiment de Gassion
en 1637 : "Ils se faisaient donner 20 sols par teste et par jour, et
ceux qui ne voulaient ou ne pouvaient payer, on leur chauffait les
pieds. Ils trainaient avec eux chariots et charrettes, emportant
meubles, ferrements, pots escuelles, tout comme si c'eust esté au sac
d'une ville ennemye".
Avec eux arrivent les maladies. La peste est endémique et alliée à la
guerre, à la disette voire à la famine, vide des villages entiers de
leurs habitants.
Certains ne se relèveront pas. A signaler tout de même que Soupy n'existait plus depuis longtemps en tant que village.
Une quantité d'escarmouches se sont passées dans notre région et certaines nous sont connues par Denain et Fulgence Richer.
On pourra en lire quelques unes comme en cette année
1647 et 1648
Pouilly, sans doute de cœur avec le duc de Lorraine, à proximité de la
France, suivant la destinée de Stenay, souffrit de cette position
limitrophe.
Nous ne savons rien d'officiel de nos ancêtres pour cette période. Tout
au plus connaissons nous la date approximative de naissance
de
Louis Gobert et son épouse
Françoise Thomas entre
1630 et 1640.
Ce couple est à l'origine de la majorité des habitants de Pouilly, Guichard, Gobert, Lambert etc.
Et à ce propos ne doit on pas se poser la question de notre ascendance ? A une
époque où la soldatesque vivait sur le pays, tuait, violait... N'aurions nous pas du sang Croate, Suédois, Allemand ?
Certains historiens pensent que cette période troublée fut à l'origine
du développement de la sorcellerie. Dans des temps incertains les
rapports de l'homme au surnaturel se trouvent modifiés. On cherche la
cause et les auteurs de ces troubles.
La xénophobie fait son lit de ces malheurs. L'étranger, le juif, le
protestant et d'une manière générale, celui qui n'est pas comme
les autres est le coupable idéal.
Notre duc de Lorraine
Charles IV fut un acteur malheureux de cette guerre.
On ne peut donc faire l'impasse sur ce prince qui ne sut jamais tenir ses engagements même pour sauver son duché.
On pourra lire en plus de l'ouvrage d'Henri Bogdan :
"L' histoire de la guerre de trente ans" par Schiller (Lenormand 1805 disponible à la BNF)
"La paix de Westphalie, vers l'Europe moderne" (Ouvrage collectif, imprimerie nationale, 1998 isbn 2-7433-0300-X)
"Simplicissimus l'aventurier", le roman picaresque de Hans Jacob Chritoffel von Grimmelshausen (1620-1676)
"...avec une force singulière, il brosse la fresque d'une Allemagne
rendue exsangue par la guerre; Simplicissimus son héros tente de
survivre dans un pays ravagé où règnent pillage et désordre.. Le roman
donne la mesure de ce que furent les troubles qui régnaient en
Allemagne à cette époque..." Sabine Weispeiser dans la préface. Juin
1988 Acte Sud. Isbn 2-86869-234-6
A voir au musée de Nancy les gravures de Jacques Callot.
L'ensemble est intitulé "Les grandes misères de la guerre".