Le Châtillon
Nous n'avons pas de preuve écrites de l'existence d'un "château"
à cet endroit, si ce n'est la tradition locale et le toponyme qui y fait
allusion.
Il existe pourtant quelques écrits :
E.Biguet en parle en 1901 page 28.
H.Lemoine en 1909 page 626.
G.Clausse en 1979 dans sa notice Pouilly sur Meuse SRA.
Pierre Congar écrit dans "Sedan et le pays sedanais" Editions FERN :
"Le petit castellum de Montfort au-dessus de la Meuse et de Vincy,
séparé du plateau par un large fossé, semble avoir été un refuge et un
poste de surveillance; en face de lui le castellum de Châtillon,
aujourd'hui dans le département de la Meuse surveillait l'autre rive".
Et la tradition dit qu'il y existerait un puits.
Ce que je mets en doute, à moins de nappes phréatiques inconnues et que la
recherche d'eau au XXe n'aurait pas trouvé !
Les connaissances en puisaterie auraient-elles permis un tel projet ?
Je ne crois pas qu'il ait existé. Ou alors puisait-il dans des sources d'Autreville ? Ce qui reste à prouver.
On parle aussi d'un
trésor ! Comme dans beaucoup de villages. Sauf que Pouilly en a possédé un vrai, découvert par hasard en 2006.
Mais celui du Châtillon reste à inventer... Ces soupçons de trésor
viennent peut être de ce texte sur le retour du seigneur de Pouilly en
1792.
Le paysan aisé y avait peut être caché quelques biens... Mais là encore rien de concret...
On y trouve comme on le verra sur les photos des pierres monumentales sculptées.
Mais
elles sont réparties en plusieurs endroits et en tout cas en nombre insuffisant
pour représenter les restes d'une construction importante.
On peut bien sûr penser que ces ruines ont servi de carrière pour
d'autres constructions. Les pierres des murets soutenant le terrain
dans la cote du Châtillon pourraient voir ici leur origine.
Hubert Colin (1938-2018) ancien archiviste des Ardennes, avec qui j'avais visité en 1978 le
site, se demandait si ces pierres de taille imposante n'avaient pas
servi à une construction de type socle d'un télégraphe optique. Mais
rien ne permet de penser qu'il y en eût un à Pouilly.
L'hypothèse d'un socle ayant servi de base aux triangulations
nécessaires aux cartes de Cassini, ne tenait pas non plus. Pouilly ne se trouvant
pas dans une zone d'observation.
L'éventualité de bois de justice, nécessitant un base stable peut par contre être envisagée et on le verra ci-dessous.
Parmi ces pierres en voici une assez particulière. Jean-Pierre
Lemant du CARA (Centre Ardennais de Recherches Archéologiques) la pense
d'époque mérovingienne.
Je l'avais photographiée dans les années soixante dix. Elle s'est perdue depuis, mais sans doute pas pour tout le monde...
En effet des fouilles sauvages ont lieu au Châtillon, comme nous
l'avons constaté lors de notre sortie du 15/02/2019 avec Nicolas Lemmer
archiviste de Stenay.
Ces fouilles posent un problème pour l'historien :
- Si le site n'est pas fouillé officiellement, on ne sait rien, certes, mais il est préservé.
- Si il est fouillé par des gens sérieux, leurs trouvailles servent
l'histoire. A condition que le résultat des recherches soient un jour
publié. Pour le
trésor de Pouilly, il fallut plusieurs années ! Et là l'historien amateur se heurte à l'intelligentsia universitaire.
- Si leurs découvertes se retrouvent à la vente, ou en collections
privées (Et bien souvent sans que l'origine de celles-ci soient
indiquées) c'est une perte historique.
En résumé, ces "pseudo-historiens", archéologues devraient réfléchir
avant de creuser dans un patrimoine qui ne leur appartient pas.
La proximité de sites gallo-romains avérés, laisse penser que le Châtillon ait pu être fortifié et habité.
En effet on est à vue des sites du Flavier au dessus de Moulins et de Sainte-Hélène à Létanne.
Le problème de l'eau pouvait se résoudre par la proximité des sources d'Autreville.
Le Châtillon est cité sur toute les cartes particulièrement sur celles des Naudin mais sous deux noms différents.
La première ci-dessous fait état d'un "château de Châtillon ruiné".
Et celle-ci d'un lieu de justice : " Justice de Châtillon".
On peut y reconnaître une sorte de cube dessiné et évoquant un socle pour des potences ?
Mais
pourquoi installer un gibet si loin du village ?
Tout simplement pour que chacun puisse voir, et de loin que le seigneur du lieu avait pouvoir de justice.
(Les Estats du Duc de Lorraine ou sont les Duchez
de Lorraine et de Bar. Le Temporal des Eveschez de Metz, Toul et Verdun
/ Dédié au Roy ; par... A. Hubert Source : Bibliothèque nationale de
France, département Cartes et plans, GE BB 565 (8, 54-59)
)
On remarque sur la photo aérienne la forme oblongue de ce lieu.
Et lorsqu'on monte au Châtillon, il existe un petit abrupt d'un mètre
cinquante environ qui ne laisse aucun doute sur l'origine humaine de cette
levée de terre.
Sur cette photo de 1950 cette levée est encore plus évidente.
Le châtillon jusque dans les années soixante était un lieu de culture
et de vignes, avec des chemins, des parcelles bien définies et une
activité importante.
Ces chemins étaient entretenus comme on le constate entre autre par une
délibération du conseil en date du 04/12/1926, déclarant Gobert Onésime,
adjudicataire des travaux de nettoyage des chemins du châtillon et du
chemin Madame pour la somme de 400 francs.
Maintenant la partie versante sud a été envahie par les ronces
et une végétation inextricable. Il est quasiment impossible de
pénétrer dans cette jungle. On notera sur les photos ci-dessus les différences de végétation !
A noter aussi au châtillon, sur le versant coté Meuse, la présence d'un amas de petites pierres
parmi lesquelles se trouvent quantité de tessons de bouteille. Ces
bouteilles ne sont pas récentes. Mais pourquoi avoir emmené si loin ces
déchets ?
Enfin une anecdote que relate le chanoine Vigneron :
L'aviateur
Vedrinnes aurait en 1917 déposé un espion sur la côte du Châtillon. On peut lire cette histoire sur la page des
militaires de la première guerre.
Mais Vigneron comme à son habitude, ne cite pas ses sources... Et l'affaire est assez peu vraisemblable.
Au Châtillon se trouve une borne Géodésique indiquant le point le plus haut du territoire de Pouilly.
Coordonnées 49° 55' Nord, 5° 7' Est, Altitude 152 Mètres au dessus du niveau de la mer.
Le Châtillon est depuis le 12/03/2020 un site protégé et géré en
partie par le Conservatoire d'Espaces Naturels de Lorraine.(CEN)
Ce qui n'a pas empêché quelque(s) imbécile(s) d'y mettre le feu.
(Rendant peut-être ainsi plus aisées les recherches sauvages à la poêle
à frire ?)
Cette parcelle de 1.55 ha possédait plusieurs espèces d'orchidées, des lianes remarquables et une faune variée.
Une plainte a été déposée, mais à ce jour (fin 2021) les incendiaires courent toujours...