Le moyen-âge, une époque trop méprisée.
Le moyen-âge, une période d'obscurantisme, entre la suprématie des civilisations gréco-romaines et la renaissance.
C'est un peu ce que nous avons appris à l'école et c'est vraiment réducteur.
Que n'a-t-on dit comme bêtises sur cette période !
Tout d'abord sa fin qu'on associe à la chute de Constantinople en 1453, ou la découverte de l'Amérique en 1492.
On ne peut fixer de limites au moyen-âge.
Pour le serf, le manouvrier, le cultivateur ou l'artisan de Pouilly, de toute façon quelle importance ?
Les moyens d'existence, de cultures vivrières n'évoluent guère si ce n'est l'introduction du collier d'épaule vers l'an 1000.
On
travaille, on paie, on subit les guerres, la maladie, la famine, le tout sous l'autorité du sabre et du goupillon.
La faiblesse se met sous la protection de la force et de la crainte de Dieu.
Le sabre, c'est un personnage quelconque, mais qui par ses exploits (défense,
ravage, traité, achat, mariage etc. a réussi à
étendre son domaine. Il s'est ensuite assuré la fidélité de ses proches,
leur accordant des postes de confiance. Confiance d'ailleurs toute
relative puisque subordonnée à la reconnaissance.
Ceux-ci sont devenus "ses hommes". Et cette pratique est devenue pyramidale.
Le seigneur du seigneur devenait le seigneur de etc.
Cette obligation de reconnaissance fut à l'origine de nombreux conflits
et d'autant de traités. Pour la Lorraine, le principal restant celui de
1301, créant un Barrois mouvant et non mouvant.
Quant au goupillon ce sont les gens d'église et représentants de Dieu.
Le clergé régulier ou séculier est omniprésent. Dans les cures, les monastères, dans la rue pour les ordres mendiants.
Mais l'église ce sont aussi des évêques-seigneurs, guerriers, grands propriétaires, voire marchands d'esclaves comme à Verdun.
Les monastères fleurissent, le défrichement agrandit les domaines.
On bâtit des cathédrales, romanes puis gothiques.
Et le plus pauvre paie pour tout le monde jusqu'à la révolution et jusqu'à la séparation de l'église et de l'état en 1905.
Bien sûr pour l'élite, c'est une période de transformation culturelle, artistique, militaire.
La chevalerie, l'honneur, l'amour courtois, les croisades, les tournois
autant de "valeurs" nouvelles. (Dans notre région le tournoi de Chauvency en est l'archétype).
La renaissance venant couronner le tout, suivie du grand siècle.
Le moyen-âge en fait a imposé un ordre social où chacun doit
tenir sa place. On sera toujours le vassal ou l'homme lige de quelqu'un.
On a ses gens, on a son seigneur, on a son curé.
Si on en déroge ce sera par la rébellion, la trahison, la guerre.
La noblesse remisant l'honneur derrière ses intérêts
personnels ne s'en privera d'ailleurs pas.
Les jacqueries en seront l'expression paysanne vite réprimées, quand les possédants se sentiront menacés.
Le moyen âge est donc à géométrie variable. Les humbles l'ont vécu du IIIe au XIXe d'après Jacques Le Goff.
La
frange aisée, minoritaire ne l'aurait vécu que jusque la renaissance,
d'après Jean Delumeau. (Historia no 636 12/1999) puisqu'il se cantonne
à l'aspect culturel, artistique de cette époque etc.
Cette charte de 622 en fait un faux.
De Pouilly concernant le haut moyen-âge, on ne connait rien ou peu.
Jeantin a écrit un tas de choses mais totalement invérifiables.
Pour ne pas l'ignorer complètement, voici ce qu'il dit dans le "Manuel
de la Meuse Histoire de Montmédy et des localités meusiennes de
l'ancien comté de Chiny", 3ème partie 1863 pages 1661 et suivantes :
"L'ancien ban de Pinay, au territoire de Pouilly, est une contrée dans
laquelle, naguère on voyait de vieux bâtiments. La tradition est que là
a existé un couvent de religieuses qui fut détruit peut être bien au
passage des Huns.
Il est fait mention de Pinay dans une vieille charte, dont la date est
équivoque (La copie porte de 600 à 622. C'est évidemment un erreur
autrefois le millésime était souvent sous-entendu), et ceux qui
exploitaient ce terrage ont été affranchis de tout cens, par arrêt du
23/061667.
Par cette charte, deux anciens seigneurs de Pouilly, deux frères du nom
de Vaillant, prénommés l'un Pierre, l'autre Paul, et prenant le titre
de juges en loix, accordent à leurs sujets divers privilèges, usages,
en bois, pâturages, rivière...en se réservant uniquement le droit de
judicature. C'est là évidemment, l'origine de la moyenne justice des
municipaux du lieu.
On y voit mentionnées et réservées les donations anciennement aumonées
aux couvents d'Orval et de Saint Remy de Mouzon dont la hauteur (?)
appartenait, dit la charte aux princes de Lorraine et du Barrois.
Enfin pour conserver la mémoire de cette concession, deux tablettes de
fin métal, mentionnant les droits respectifs de l'église, de la cure et
ceux des seigneurs, sous les lettres D, D, et ceux des habitants, sous
les lettres E, L, D.
Ces deux tables durent rester déposées au manoir de Pinay.
En tête de la copie sont les armoiries de Lorraine, celles de Bar, et
celles de Pouilly. Un juge sur son siège était le sceau de Pouilly.
Rien de plus mystérieux que cette pièce. On voit qu'elle a été dressée
à une époque trouble et de guerres, et que la souveraineté du duc de
Lorraine était alors contestée. Aussi les deux seigneurs locaux
gardent-ils le secret sur ce qui le concerne. Ils annoncent seulement
qu'ils en feront mention sous les caractères F, E, E sur une autre
table dans une pierre creuse qui sera déposée sous la borne du vivier
de Pinay.
Cette charte transcrite sur parchemin fut mentionnée en l'inventaire fait en 1745 à la mort de M. Albert de Pouilly.
Elle fut produite en justice dans un procès entre ce seigneur et les
moines d'Orval au sujet de la vaine pâture appartenant à ceux-ci sur les
terres de Prouilly.
Pinay fut, il est probable le point de passage des anciens Oeulaeti dans la forêt de Dieulet".
Que tirer de tout cela ?
Il existe aux AD55 deux pages sur papier à entête du Clermontois qui en font part. Mais quel crédit peut-on leur accorder ?
Denain dans le tome 2, intitulé "Preuves" en fait part exactement dans
les mêmes termes. Mais son commentaire laisse planer un doute quant à
l'existence de cette charte, qu'il n'a d'ailleurs pas eu en main.
Dans le tome 3 page 47/90, Denain dit aussi :
"A Pouilly il y avait un ban particulier nommé Pinay, dans lequel on
voit encore des vestiges d'anciens bâtiments. La tradition est
qu'il y avait anciennement un couvent de religieuses, détruit, mais il
n'en reste aucun autre monument.
Il est fait mention de Pinai dans la charte de Pouilly, dont les
habitants ont été déchargés du terrage par arrêt du 23 juin 1667.".
Je n'ai pas à ce jour retrouvé cet arrêt.
On rencontre parfois dans des aveux et dénombrements le terme
"Moutier". ex : "Jean de Gilbervillers, écuyer, tient du comte de Bar,
sans garde, une
maison devant le moûtier de Pouilly etc.". Il ne s'agit pas d'un
monastère ou d'un couvent, mais de l'église. (Dictionnaire Godefroy).
Qu'il y ait eu quelques bâtiments dans les environs de Pinay, c'est
possible. Hubert Guichard, cultivateur à Pouilly, se souvient lors d'un
labour profond, avoir déterré une dalle constituée de pierres de petite
taille.
Mais laissons le dernier mot à Dom Augustin Calmet, abbé de Senones
dans les Vosges. De par sa fonction de président de la congrégation de
Sainte-Vanne, il était amené à visiter les différentes maisons de
ladite congrégation. C'est au cours de ses voyages, qu'il vint explorer
vers 1710 la bibliothèque de l'abbaye de Mouzon, abbaye de l'ordre de
Saint Benoit.
Il a laissé un descriptif de ce qu'il a trouvé et écrit entre autre :
"Dans la même abbaye on montre un titre faux, fabriqué il y a environ
40 ans par un gentilhomme de Pouilly village près de Mouzon. Ce
gentilhomme feignit qu'on avait trouvé sous terre et dans les haies
certaines ardoise sur lesquelles étaient gravés les anciens titre de
l'abbaye de Pinay, qui était dit-on située près de là. Ce faux titre
est en français daté de l'an de l'incarnation 622 orné d'armoiries.
Les personnes qui y sont citées, y ont des surnoms, (Pierre et Paul
Vaillant) ce qui est une marque de fausseté certaines. Néanmoins le
prieur qui était alors à (illisible) se rendit et s'engagea à payer une
pistole de cens annuel pour conserver un moulin qu'il avait fait
construire sur le terrain du prétendu seigneur". (Bibliothèque
municipale de Saint-Dié, manuscrit 73. Cité par Gilles Banderier dans
son article "Dom Augustin Calmet et l'abbaye de Mouzon" RHA no 50
2018 page 69)
La moitié des actes de l'époque mérovingienne seraient des faux,
généalogies falsifiées, fausses donations, faux titres de propriété
etc. (Anthont Grafton dans "Faussaires et critiques. Créativité et
duplicité chez les érudits occidentaux". Paris Les Belles Lettres 2004
page 33 et 34)
La famille de Pouilly s'est d'autre part distinguée avec ce fameux
Victor Poliaco mais à une époque plus tardive.
Le XIIIe siècle, siècle de lèpre nous dit
Fulgence Richer avec un certain raccourci... Voir l'année
1201
Les croisades, dont furent quelques seigneurs de Pouilly.
Monastères et défrichements.
Orval, dans l'actuel Belgique, mais aussi le Mont-Dieu (08)
Les cathédrales. Dans notre région la plus remarquable est celle de
Mouzon et en Meuse, celle d'Avioth.
Mais aussi le début de
la guerre de cent ans, conflit, entrecoupé de
trêves plus ou moins longues, opposant de 1337 à 1453 la dynastie des
Plantagenêts à celle des Valois, et à travers elles le royaume
d'Angleterre et celui de France.