La naissance, une expérience pas toujours drôle !
Cette page est générale, et concerne la période XVIIe-XVIIIe.
Le XIXe amènera par les progrès de la médecine quelques
améliorations à l'arrivée des nouveaux nés, à leur santé et à celle de
leur mère.
On trouvera quelques renseignements en choisissant ci-dessous.
Pour les statistiques, voir cette page
Statistiques naissances.
Généralités
Le nombre d'enfants
L'intervalle protogénésique, qui sépare le mariage et la première
naissance, est en moyenne générale, légèrement supérieure à un an, mais
près de la moitié des épouses deviennent mère vers le 10e mois. Les
espaces intergénésiques, séparant les naissances ultérieures,
s'allongent progressivement avec l'âge; Dans l'ensemble, les naissances
interviennent au rythme d'une tous les deux ans et demi, en raison de
la pratique de l'allaitement qui entraîne chez les femmes l'incapacité
de procréer (aménorrhée). Si l'enfant meurt en bas âge l'espace
intergénésiques et plus réduit ; il en est de même des femmes qui
n'allaitaient pas leurs enfants. Dans les familles complètes (famille
ou
l'union n'est pas rompue avant la fin de la période de fécondité
féminine), le nombre moyen des naissances, variable essentiellement en
fonction de l'âge au mariage, est de six à sept, parfois huit ; mais si
l'on tient compte des veuvages précoces et des cas de stérilité, la
moyenne générale s'établit, sous l'ancien régime à quatre ou cinq
naissances.
Comme exception Claude Thomas et Jeanne Marguerite Chollet auront de
1765 à 1790 18 enfants dont 12 meurent en bas âge.
Citons aussi le cas de ce Guichard Antoine (1716-1788) , qui se marie 3
fois et a au total 20 enfants de 1746 à 1778. Cinq meurent en bas âge.
(un de ses enfants
Guichard Pierre recevra la légion d'honneur pour
faits d'arme)
Plus prés de nous, le 17/11/1922, Joséphine Aurélie Bohan, épouse de
Jean-Baptiste Jonet, reçoit la médaille d'or de la famille française
pour
avoir eu 17 enfants, dont 13 étaient encore vivants.
Le grand nombre d'enfants c'était aussi l'assurance d'une main d'œuvre
bon marché. C'était l'espoir d'être recueilli par l'un d'eux quand la
vieillesse, les maladies rendraient les parents dépendants. Car on ne
mettait pas ses ascendants en maison de retraite comme on le fait
actuellement.
Garçon ou fille ?
On ne le savait pas d'avance. Pas d'échographie, mais des remèdes, des
astuces pour connaître le sexe de l'enfant, avec un tel pourcentage
d'erreur qu'on ne pouvait s'y fier...
Dans une ferme ou une boutique on préférait bien sûr des garçons pour
les bras qu'ils représentaient, et pour la reprise de l'activité en cas
de décès du père. Mais on prenait ce qui arrivait.
Il existait pourtant des "méthodes" pour favoriser la naissance de
mâles.
L'une d'elles frise l'acrobatie mais gagne sans doute à être
expérimentée
!
Ainsi, dans un ouvrage publié en 1800,
plusieurs fois réédité, et largement diffusé dans le pays par les
colporteurs
de 1800 à 1811, l'accoucheur français Jacques-André Millot, qui assista
notamment dans leurs couches la reine Marie-Antoinette et les duchesses
d'Orléans et de Bourdon, préconise une méthode pour enfanter un
garçon.
"Pour avoir un garçon, le mari doit
toujours coucher à gauche de sa femme. Il doit ensuite passer la main
gauche
sous la hanche ou fesse droite de son épouse, pour donner l'inclinaison
qui
détermine la liqueur à se porter du côté droit, puis soulever la fesse
droite
de cette dernière pour que sa hanche forme un angle de 25 à
30 degrés avec
le plan du lit. En outre, les possibilités et l'angle de tir du canon
de la vie
doivent varier en fonction de la position respective des deux époux du
poids de
chacun et de l'élévation du lit."
Une régulation des naissances ?
Un catéchisme de 1782 pose cette question :
"Quelles sont les principales fins du mariage ? Réponse : La
première est de donner des citoyens à l'état, des enfants à l'église,
des habitants au ciel".
Voilà qui laisse peu de place à un planning familial !
En apparence, la fécondité est telle dans l'ancien régime qu'elle
écarte l'hypothèse des pratiques contraceptives. En fait, si celle-ci
se manifestent d'abord dans les groupes dominants, on ne peut affirmer
avec certitude qu'elles sont totalement ignorées dans les milieux
populaires. Il est possible qu'elle joue un rôle de frein dans le
rythme des naissances chez les mères âgées de 35 ans et plus mais le
phénomène reste assez limité (l'historien démographe Jacques Dupâquier
l'évalue grossièrement à 10 % maximum)
A côté des vieilles drogues, des pessaires et des préservatifs (les
condoms), les deux méthodes contraceptives sont l'étreinte réservée que
certains théologiens tolèrent s'il n'y a pas d'émission séminale chez
la femme, et le coït interrompu.
Au XVIIIe siècle, la contraception tend à ne plus être condamnée comme
homicide, mais comme violation des droits du mariage. Les vrais
changements interviennent après 1740 et surtout après 1770. La
diffusion de la contraception est très inégale suivant les régions,
traduisant des comportements locaux différents; L'apparition de la
contraception dans les masses populaires, provoquent la baisse du
nombre
moyen d'enfants par famille, du taux de fécondité légitime après 30 et
surtout 35 ans, et de l'âge des mères à la dernière naissance, donc un
affaiblissement du taux de la natalité. Elle signifie aussi un
changement de mentalité dans la conception de la vie et de la famille.
Quant aux avortements provoqués, il n'existe bien sûr aucune trace,
autres que judiciaires. La série U des archives nous apprend que cette
pratique existait et que les femmes "coupables" étaient souvent plus
punies que les auteurs de viols. Longtemps considérés comme
infanticides, les femmes qui le pratiquaient, pouvaient être condamnées
à mort.
Les "funestes secrets" étaient souvent des boissons à base de plantes
connues pour stimuler l'apparition des règles, mais qui à haute dose
pouvaient provoquer des fausses couches.
Les "tricoteuses" et "faiseuses d'anges" utilisaient des aiguilles à
tricot pour percer la poche des eaux et déclencher l'avortement. De
tels procédés étaient dangereux pour la femme, tant pour les conditions
d'hygiène que pour les risques d'hémorragie. Ces méthodes ont perduré
jusqu'au milieu du XXe siècle, et ce n'est qu'au XXIe que le droit à
l'avortement a été inscrit dans la constitution, au grand dam de la
droite bien pensante et religieuse.
A Mouzay, un jugement de désaveu de paternité, du tribunal de Montmedy,
nous apprend qu'Alix Charlier a cherché à se procurer des médicament
abortifs. Elle était en effet enceinte d'Albert Martinet, mais dont le
père Émile Martinet était en garnison à Lons-le-Saunier lors de la
conception... (AD55 Mouzay 1873-1882 115/269)
Quand naissait on ?
Si la
venue d'un enfant est maintenant raisonnée, ce ne fut pas toujours le
cas pour nos ancêtres.
La régulation des naissances n'est pas ou trop peu dans les mœurs.
Mais sur ce graphique analysant les naissances de 1673 à 1890, on peut
remarquer une baisse de natalité de mai à août, période de travaux
champêtres.
Est-ce à dire que nos aïeux calculait en fonction de ces contraintes ?
Faut-il aussi y voir une conséquence de la date de mariage pour
l'arrivée du premier né ?
Il faudrait sans doute affiner ces résultats par siècles, encore que le
mode de vie ait peu changé du 17 ème au 19 ème.
Les naissances multiples.
On en trouve mais assez peu, et il est à remarquer que ces
enfants ne font pas de vieux jours. Est-ce-dû à des problèmes
d'allaitement insuffisant, des poids à la naissance trop faibles ?
En voici quelques exemples :
Les premières jumelles connues, Hélène et Marie Anne, naissent chez
Louis de Pouilly et sa femme Marie de Pouilly. le 10/04/1678. (AD55
1673-1722 27/276)
Marie et Evrard Maidy naissent le 12/12/1682, enfants d'Anthoine Maidy
et de Jeanne Lambert. (AD55 1673-1722 50/276)
François Lambert et Geneviève Damery ont une fille Marie Jeanne le
17/05/1749. (AD55 1723-1759 163/267)
Mais un Jean Baptiste Lambert, leur fils, décède le
24/12/1749 à 7 mois (AD55 1723-1759 168/267). Il serait donc né en mai
1749, comme cette Marie Jeanne. Mais son acte de naissance n'est
pas inscrit sur le registre. Pourquoi ?
Des
triplés par exemple chez
Gilles Saucette et Marie Catherine Breux le
03/02/1766 (AD55 1760-1791 69/345) Ils ne vivent que deux ou trois
jours.
Des jumeaux chez Antoine Pelletier et Marie Anne Durlet le
04/07/1785
(AD55 1760-1791 292/345). Ils ne vivent que quelques semaines. Il
réitèrent le 06/03/1791 avec Louis Pierre et Nicolas. (AD55 1760-1791
339/345)
Des jumeaux le 2903/1801, Philippe et Rose Tribut, enfants de Jean
Nicolas Tribut et de Marie Guichard. Le maire ne rédige qu'un acte pour
les deux ! (AD55 1796-1807 45/135)
Des jumeaux, Jean Baptiste et Pierre, le 18/01/1801 chez Pierre Godet,
tisseur en toile, et Marie Gobert. (AD55 1796-1807 43/135). Ils
décéderont, le premier à 14 jours et le second après une heure
d'existence...
Des jumelles Barbe et Marie Catherine Durlet, nées le 01/09/1810,
filles de Pierre Durlet, adjoint au maire et de Marie Heein, son
épouse. (AD55
1802-1812 131/174). Elles ne passeront pas l'âge d'un mois.
Des jumelles également, Marguerite et Anne Adélaïde, chez Jean Lorson
et Marie Lambert le 22/04/1813. (AD55 1813-1822 16/200)
Marguerite meurt dans l'année le 27/12.
Nicolas Félix et Pierre Théodore Colin sont jumeaux et naissent le
20/02/1818, de Jean Baptiste Colin, préposé aux douanes royales de la
brigade de Pouilly, et de Marie Balon son épouse. (AD55 1813-1822
124/200)
Jean Baptiste et Anne Marie Chauvancy naissent le 01/09/1822, enfants
de François Chauvancy et d' Elisabeth Thomas. (AD55 1813-1822 176/200)
Jean Baptiste Jonio et Victore naissent le 17/05/1823, de Jean Joseph
Jonio, garçon batelier et de Thérèse Balzamie Gobert. (AD55 1823-1832
15/212)
Jean Baptiste et Marguerite Poterlot, enfants d' Alexandre Poterlot,
charron et de Jeanne Tribut le 10/05/1824. (AD55 1823-1832 21/212)
Pierre et Marie Célestine Arnould naissent le 17/12/1825 de Michel
Arnould, maçon et de Victoire Aubry. Pierre décède le 22 du même mois
et
sa sœur le 05/01/1826.
François et Anne Victoire naissent le 30/05/1826 de Jean Baptiste
Richy, cultivateur à Prouilly et de Elisabeth Michel. (AD55 1823-1832
33/212)
Nicolas Poterlot et Marie Catherine naissent le 02/01/1827 d' Alexandre
Poterlot, charron et de Jeanne Tribut. Il décédera le 17 et elle le 5
du même mois.
Jean Baptiste et Marie Catherine Aubert, enfants de Henry Aubert,
tonnelier et de Marie Catherine Morlet, naissent le 18/04/1827. (AD55
1823-1832 39/212)
Pierre et Anne Marie Gobert, enfants de Joseph Gobert et de Maire
Durlet,
naissent le 09/02/1828. Ils décèdent le 12 du même mois. (AD55
1823-1832 42/212)
Marie Elisabeth Euphrasie et Jean Baptiste, enfants de Nicolas
Martinet, vigneron et de Marie Catherine Adnesse, naissent le
06/09/1844. (AD55 1843-1852 41/369). Ce
Jean
Baptiste Martinet deviendra missionnaire en Chine.
Constance Pierrard, femme de Jacques Guichard accouche le 04/07/1848 de
Marie Marguerite et Marie Alexise. (AD55
1843-1852 134/369)
Scholastique Gobert, mariée à Victor Guichard met au monde le
12/08/1859, Jean Baptiste et Marie Augustine. (AD55 1853-1862 145/227)
Marie Victoire Richy, femme de Charles Berton accouche le 18/09/1861 de
jumeaux. Pierre Édouard "le premier sorti du sein de sa mère" suivi de
Marie. (AD55 1853-1862 185/227). Marie décède le 17/09/1861, suivie de
son frère le 18. (AD55 1853-1862 198/227)
Pauline Gobert épouse de Jacques François accouche le 16/12/1863 de
Marie Thérèse et Jean Baptiste. (AD55 1853-1862 13/179)
Quatorze années après, elle a de nouveau des jumeaux, Marie Zélie et
Édouard, le 11/08/1877. (AD55 1873-1882 78/177)
Marie Geneviève Durlet, épouse de Jean Baptiste Ernest Fedricq,
accouche le 28/03/1865 de Marie Josèphine et Marie Victoire. (AD55
1863-1872 39/179)
Anne Marie, épouse de Justin Ricard, cantonnier du halage, accouche de
jumeaux le 18/04/1867. Le premier est un enfant sans vie. Le second
Victor, décède le 08/05/1867. (AD55 1863-1872 83/179)
Le 27/07/1868, Alfred Didier et Thérèse Amélie Guichard ont des
jumelles. Marie Julie la première est vivante, mais la seconde est sans
vie. (AD55 1863-1872 83/179)
Eugène Halbutier, marchand de fromages à Pouilly, a de Marie Anna
Isabelle Guichard, son épouse, des jumelles, Marie Julie et Marie
Eugénie, le 11/05/1874. (AD55 1873-1882 31/177)
Adolphe Eugène Dorme est chef
de gare en 1882. Il déclare la naissance de jumelles, Stéphanie Félicie
Marie et Jeanne Léonie Valérie, le 03/01/1882. (AD55 1873-1882
162/177). Il était marié à Maria Berthe Marat.
Jean Baptiste Jonet et son épouse Joséphine Bohan, ont des jumelles
Julie et Clémence, nées le 26/06/1900. (AD55 1893-1902 47 et 48/130)
Lucie décède le 02/10/1900 et Clémence le 04/07/1900.
A noter qu'à Sorcy (55) il naquit des quintuplés le 22/04/1766 de
Claude Lallemand, vigneron et Marie Anne Colin. Les cinq filles ont
vécu 1 heure, le temps d'être baptisées. (AD55 Sorcy 1757-1775 78/210)
La légende prétend que le père attendait au cabaret pendant
l'accouchement et qu'il ne rentra qu'à l'annonce de la cinquième
naissance, déclarant : "Il faut que je rentre à la maison, autrement
ça ne s'arrêtera pas". (Société d'histoire et d'archéologie de la
Meuse 1965 page 99)
L'ordre d'arrivée des enfants n'avait que peu d'importance chez nos
ancêtres. Pourtant on trouve parfois spécifié sur l'acte de naissance
qui est arrivé en premier. Ainsi Antoine Edmond Thomas précise que son
fils Achille Gustave Thomas "est sorti le premier du sein de sa
mère..." tandis que Ferdinand Georges Thomas se contente de la deuxième
place. (AD55 Brouennes 1873-1882 145/214 actes 18 et 19)
Cet heureux père était en 1885 exploitant de la ferme de Vigneron.
En France la loi précise que c'est le premier "sorti", même en cas de
césarienne, qui est l'ainé, contrairement à la légende qui voudrait que
le deuxième le serait, ayant manifesté son envie de sortir en poussant
son jumeau !
Les périls de la naissance
"L'an 1730 le 12 novembre est décédée en cette paroisse Catherine
Moreaux mariée à Pierre Vitry âgée de 24 ans... Après la mort de ladite
Catherine Moreaux, elle a été ouverte et on a trouvé dans son sein un
fils
vivant qui a été ondoyé à la maison en présence de plusieurs personnes
et ensuite porté à l'église pour suppléer la cérémonie du baptême et
n'est mort qu'après que nous l' avons faite en partie etc."
Cet acte qu'on trouve dans les registres paroissiaux de Septsarges dans
la Meuse illustre le titre de cette page.
La naissance n'était pas toujours drôle.
Mais ce n'est pas un cas isolé. Ainsi lit on dans les registres de la
paroisse de Corbion en Belgique :
"L'an de grâce 1707 le 21 ème jour du mois de mars est décédée en cette
paroisse Anne Wilheme en son vivant femme à Albert Wilmet étant âgée de
29 ans ou environ et a été inhumée etc. Elle était enceinte et on lui a
ouvert le coté d'où l'on a tiré l'enfant en vie qui a été baptisé par
le soussigné vicaire et immédiatement après mort enterré avec sa mère.
Marie Brimont sage-femme et Marie Noël ont fait cette opération par les
sollicitations du vicaire présent, en foi de quoi etc."
Ou encore à Saunay (38), cité par Sonia MARISSAËL-LANDGREBE :
"Anne CHAPIN, décédée à 45 ans en 1772 :
« morte en
couches, l’'opération césarienne lui a été faite après son décès et
outre un enfant bien conformé, on a trouvé une masse de chair de 7 à 8
livres ». Il s'agissait sans doute d'un fibrome.
Ou encore :
Un médecin meusien fut appelé auprès d’une femme en douleur depuis plus
de 30 heures. Présentant une malformation du bassin, elle ne
pouvait donner naissance à son enfant. Le médecin dut pratiquer une
opération en coupant la symphyse (une articulation du bassin).
Quand le lendemain il revit voir la patiente, il constata « La
malade qui depuis l’opération, n’avait point été changée à cause de
l’étroitesse de l’entrée de son alcôve, gisait sur de la paille pourrie
par les urines, les matières fécales et les vidanges qui avaient coulé
abondamment, ce qui rendait suffocante l’atmosphère qui l’entourait, et
me faisait craindre pour elle des accidents. Je fis renouveler toute la
paille, ce qui ne put être fait qu’à plusieurs reprises, tant l’odeur
ammoniacale qui s’en exhalait, était piquante et caustique. Je fus
obligé de laisser la malade jusqu’au 8e jour dans ce réduit
infect, faute d’une paillasse sur laquelle je l’eusse placée au milieu
de la chambre »
(Observation sur une opération de la symphyse » in « Journal
de médecine, chirurgie, pharmacie » 1803, page 121 Mansuy. Le
texte complét, très chirurgical est consultable sur le site de Paris
Descartes)
Cette autre naissance racontée par Dameras, elle, se termine bien, mais
dans quelles conditions !
"22 août est née au chemin d'Hannogne (08) à Forest, Angélique Labart,
fille de Jean Labart et Jeanne Peltier. Celle-ci s'est accouchée elle
même. Elle a pris son enfant dans son tablier et est revenue à 6 heure
du matin". (je n'ai pas trouvé l'acte mais cette naissance existe bien
dans les TD d'Hannogne)
On ne parlait pas encore de dépression post partum !
Le transport du bébé à l'église, par n'importe quel temps pour y être
baptisé n'était pas sans danger.
Quand les registres furent tenus par la municipalité, l'obligation de
présenter l'enfant ne lui apporta pas plus de sécurité.
On pourra d'ailleurs le constater dans les tableaux statistiques à
cette page
Mortalité infantile.
Mais n'oublions pas que jusque dans les années soixante, il était
courant de naître à la maison.
Les risques, sans doute atténués par la présence d'une sage
femme formée, d'un médecin qui n'hésitait pas à se déplacer, étaient
tout
de même bien réels.
Puis les futures mères ont pris l'habitude de se rendre en milieu
hospitalier et on ne peut que s'en réjouir.
Seuls les généalogistes et les maires de petites communes trouveront à
y redire. En effet certains villages n'enregistrent plus la moindre
naissance depuis cette avancée.
Et les chercheurs auront bien du mal à identifier le lieu d'origine de
M. Untel né à Sedan ou à Verdun. (Jacques Lamarle quand il était maire
notait les enfants nés à l'extérieur du village.)
Pour la mère, l'accouchement, si elle en réchappait, n'était pas fini
pour
autant. En effet elle devait rester cloîtrée chez elle pendant 8 jours,
ne rien faire pendant 40, le temps de se "purifier" de l'acte sexuel à
l'origine de la naissance ! (on croit rêver)
Donc 40 jours après, avaient lieu les relevailles, cérémonie religieuse
qui heureusement a aujourd'hui disparue.
Elle pouvait enfin reprendre une vie normale.
La mortalité infantile
La mortalité infantile est à la fois provoquée par des causes
endogènes, dues à la rareté et à la médiocrité des médecins et des
sages femmes, et par des causes exogènes telles que les travaux
épuisants effectués par les femmes enceintes.
Mortalité considérée comme une fatalité par nos ancêtres mais qui
s'explique aussi par le manque d'hygiène.
Hygiène corporel de la mère, de la matrone ou sage-femme, de
l'environnement.
On ne lavait pas l'enfant. Tout au plus à la naissance l'essuyait-on
avec un linge imbibé d'eau et parfois de vin.
La crasse était considérée comme protectrice de la fontanelle !
La naissance était l'affaire de
toutes les commères du village. On s'affairait près de la
future mère avec tous les risques sanitaires d'une telle promiscuité.
L'examen par un chirurgien n'est jamais observé en milieu rural avant
le XIXe.
Exception tout de même à la naissance d'un enfant de Michel Ponsin et
Marie Anne Hussenet, le 20/10/1775. La présence de Armand Varroquier,
chirurgien de Mouzon, est signalée car il ondoie l'enfant qui n'y
survivra d'ailleurs pas. (AD55 1760-1791 168/345)
Mais Michel Ponsin est
maître d'école donc sans doute plus sensible aux problèmes de santé.
A Letanne il faut signaler la présence d'un "accoucheur", Jean François
Rouppe à la naissance de Julienne Nivoix le 14/09/1785. (AD08 Letanne
1772-1792 88/154)
Le peu de savoir des sages-femmes, (
Élisabeth
Sperlet en 1705 ne savait pas signer.) était dévastateur.
Elle était choisie surtout pour ses qualités morales puisqu'elle était
appelée à
baptiser le nouveau né en cas d'urgence. (En fait ce n'était pas un
baptême, mais un ondoiement. Si l'enfant survivait le curé suppléait au
baptême.)
Ce choix était celui des femmes du villages mais devait être validé par
les autorités religieuses.
La liste des sages-femmes connues à Pouilly est sur la page
sages-femmes.
Marguerite Stevenot née à
Pouilly en 1700, après avoir épousé Ponce Lecuyer habite Vilosnes où il
est meunier. Il décède, elle se remarie avec Victor Noizet qui décède à
son tour en 1742. Elle est élue sage femme en 1744
"Aujourd'hui 21/06/1744 Marguerite Stevenot veuve de défunt Victor
Noizet habitante de cette paroisse âgée de 45 ans ou environ a été élue
dans l'assemblée des femmes de cette paroisse à la pluralité des voix
et suffrages pour exercer l'office de sage-femme et a fait le serment
entre nos mains conformément à l'ordonnance de Monseigneur l'évêque
comte de Verdun laquelle a signé et marqué avec moi curé dudit
Vilosnes" (AD55 Vilosnes 1742-1791 24/389)
Elle décède à Vilosnes le 16/02/1762
Souvent elles avaient appris sur le "tas" et ce n'est qu'en 1750 qu'on
leur imposera une formation théorique et pratique de 2 ans avec une
maîtresse sage-femme, un jury de deux maîtres chirurgiens validant
leurs connaissances.
Dans le département, une école d'accouchement avait été créée en 1821 à
Bar-le-Duc, située dans les bâtiments de l'hospice de cette ville. En
1840 il y avait 12 élèves admises à l'école à leurs frais ou aux frais
des communes. Ce qui semble bien peu pour un département. (Annuaire du
département de la Meuse
1840
(BIBR 114) )
En plus de leur ignorance, les sages femme étaient démunies devant un
accouchement difficile. Pas de forceps, ils n'apparaitront que fin
XVIIIe. Il fallait parfois découper l'enfant pour le sortir !
On ne connait pas le nombres de nouveaux nés éclopés par leurs bons
soins...
Et que faire d'un enfant prématuré ? Pas de couveuse dans les
chaumières !
L'obligation par tous les temps d'emmener le nouveau né se faire
baptiser était aussi facteur de mortalité. L'église n'était pas
forcément proche; neige, pluie, vent accablaient l'enfant qui n'en
revenait pas toujours. Mais pas question de prendre le risque de le
voir
mourir non baptisé ! Les limbes dans ce cas était son tourment
éternel.
On trichait parfois un peu... En ne baptisant que la partie du corps
qui était visible... On était sûr de l'avoir vu remuer même
faiblement, ou rosir quelque peu, signe de vie précaire qui
justifiait la validité du baptême.
On pourra lire à ce propos le "Bref recueil de l'état de l'église Notre
Dame d'Avioth" par son curé Jean Delhôtel. (AD55 12 G 23) transcrit par
Jean Lanher (1924-2018) linguiste lorrain Ce
Ce recueil de 233 feuillets est plus un corpus des enfants mort-nés,
présentés à Notre Dame, ressuscités le temps du baptême et "retournant
à leur état précèdent de mort", qu'une histoire d'Avioth.
Delhôtel fut nommé en 1636 et décéda en 1683.
Mais l'église n'était pas dupe...
Aux archives paroissiales de Gerouville (Belgique actuelle) on peut
lire la formule du serment prêté par les sages femmes, lors de leur
nomination :
" Semblablement que vous ne baptiserez enfant si il n'y a vie apparente
et pourtant que plusieurs fois se commettent beaucoup d'abus des
enfants morts nés qui se portent aucune fois à notre Dame ou autres
saints, vous jurez que vous ne commettriez nuls abus et que ne ferez
chose à l'endroit des dits enfants, par quoi semblerait y avoir vie et
elle n'y serait".
Ne nous moquons pas. Nos ancêtres avaient peur de l'au-delà et partir
sans sacrement était une catastrophe.
Cette frayeur était d'ailleurs savamment entretenue par le clergé.
Les curés appliquaient sans scrupule la règle d'enterrer les nouveaux
nés hors du cimetière habituel.
Ainsi peut-on lire : "Le 29/01/1755 est venu au monde sans avoir donné
aucun signe de vie un enfant en légitime mariage de Jean Maljean... et
de Jeanne Poncelet. Le dit enfant a été le lendemain inhumé sans aucune
cérémonie de l'église ... dans un coin destiné pour les dits enfants et
qui est séparé du reste de la terre bénite par une ligne de
circonvellation qui renferme environ 4 pieds carrés de terrain au haut
du dit cimetière, dans le coin qui est proche du passage etc. monsieur
le curé ayant fait cette distraction dudit canton pour y être enterré
les dits enfants afin de parer aux inconvénients qui résultent de
laisser enterrer des cadavres d'enfants dans les jardins ou dans les
caves qui conduisent à cacher des enfants massacrés sous le voile
d'enfant morts nés etc."
Ce curé signale donc que des cas d'infanticides ou d'IVG étaient
connus. (AD08 Carignan 1747-1756 203/231)
Autre curiosité :
Les matrones pratiquaient aussi la
chirurgie "esthétique" en modelant
le crâne du nouveau né à leur convenance et on imagine facilement le
stress et la douleur de l'enfant. On en voit une sur la droite tripoter
le crâne du bébé tandis que les autres femmes réconfortent la mère.
La correction de morphologie se faisait aussitôt le premier bain de la
naissance.
"Souvenez vous aussi, pendant que les os de ces membres sont amollis
par la chaleur du bain où vous l'avez lavé, de leur donner à chacun, en
les maniant doucement la forme et la rectitude qu'ils doivent avoir,
pour composer un tout parfait".
S. de Sainte Marthe, La manière de nourrir les enfants à la
mamelle, Paris 1698 (1 ère édition 16 ème ) page 52.
Si on ne peut évaluer les conséquences de ce "bricolage
esthétique", on peut les imaginer.
Quand les sages femme ont été enfin formées, elles recevaient une
indemnité de la commune.
Ainsi en 1850 les archives nous disent que celle de Pouilly touchait
150 fr.
Et après la naissance...
La mortalité entre 0 et 20 ans reste également élevée. On estime que 25
% des enfants n'atteignent pas l'âge d'un an, et 25 % celui de 20 ans.
Voici l'exemple du couple Claude Thomas (1743-1791 et Jeanne
Margueritte cholet (1745-1826) Ils ont eu 18 enfants de 1765 à 1790.
Douze sont morts en bas âge. Pour un treizième, je n'ai pas trouvé
l'acte de décés.
La mortalité infantile a de multiples causes :
Le décès maternel n'y est pas étranger. Le père ne pouvant suppléer
cette disparition.
Les tares héréditaires ou les malformations congènitales.
Les accouchements prématurés.
Les maladies comme rougeole, varicelle, coqueluche, oreillons, rubéole,
diarrhée...
S'ajoutent à cela les morts accidentelles ou pas...
L'enfant dort souvent avec sa mère, autant par manque de place que pour
faciliter l'allaitement nocturne. L'église condamne cette pratique
populaire qui entraîne parfois la mort par étouffement. Mais à une
époque où la plupart des maisons sont peu ou mal chauffées, coucher un
enfant auprès de soi peut aussi apparaître comme un geste protecteur.
L'insistance des prêtres à dénoncer cette pratique prouve la fréquence
des accidents liés à cette façon de partager le lit avec ses enfants.
Mais le danger est omniprésent.
S'ils ne sont pas étouffés ou fauchés par les maladies, les enfants
peuvent à tout moment tomber dans la mare, le puits, le lavoir, la
rivière, le feu, sans oublier le risque des animaux et des outils de la
ferme.
Que dire des négligences quotidiennes ? Diderot perdit un enfant qu'on
avait laissé tomber sur les marches de l'église en allant le baptiser…
On ne compte pas non plus les procès d'animaux comme ce porcs ayant
dévoré un enfant ou ce chat l'ayant étouffé.
Et on ne connait évidemment pas le nombre d'infanticides et
d'avortements provoqués ou non.
Si l'intervalle intergenesique dépasse deux à trois ans il est presque
certain que la femme a fait une fausse couche.
Ce qui aggrave encore les statistiques que l'on verra siècle par siècle.
L'allaitement était pratiqué à la campagne. Le remplacement de la mère
par une nourrice se payait mais il en fallait les moyens.
Il est à noter que l'allaitement, peu pratiqué dans les classes aisées,
favorisait l'espacement des naissances et le repos (tout relatif) de la
mère.
A propos de la mise en nourrice, on n'a pas ou peu de renseignements
concernant cette pratique.
On peut supposer que les seigneurs de Pouilly en usait, mais rien ne le
prouve.
A Pouilly, il existe peu de traces d'enfants mis en nourrice :
Jean Godfrain né le 05/03/1785 à Sedan de Vincent Henry Godfrain et de
Marie Marguerite Richard, est mis en nourrice chez Jean Chauvancy "père
nourricier" écrit le curé. Il décéde à Pouilly le 23/05/1785. La femme
de ce Chauvancy, Marie Jeanine Galichet est alors âgée de 55 ans ;
comment l'enfant était-il nourri ?
Plus tard on trouve la mort du petit Onésime
Genêt le 15/12/1859, mis en nourrice chez son oncle Ponce Savignac,
charpentier. Il avait 8 mois. Ses parents Jean-Baptiste Genêt, ouvrier
et Marie-Joseph Savignac sans profession habitaient à Vaux (08)
On peut supposer que Ponce Savignac avait en fait recueilli cet
Onésime, son neveu. (AD55 1853-1862 160/227)
Il est sûr que l'enfant mort hors de sa paroisse, hors de son canton,
voire de son département ne laissait pas de trace dans son village
d'origine.
Les filles mère
On naissait en général au sein d'un couple marié.
Les filles mères bien sûr existaient mais à Pouilly finalement en assez
petit nombre, jusqu'au début du XIX ème quand le brassage de population
a commencé.
Relevées
dans les archives, il en manque sans doute, car il était d'usage
d'exiler la fille qui avait "fauté" chez un parent ou une relation hors
du
village.
L'accouchement avait souvent lieu en ville (Stenay, Mouzon sans doute
...)
Souvent la mère ne revenait pas au village. Elle devenait servante,
ouvrière quand elle ne finissait pas prostituées pour survivre, ou
cantinière en suivant le régiment qui passait par là.
Les "faiseuses d'ange" existaient même si cette pratique était
sévèrement réprimée. Elle était souvent dévastatrice voire mortelle,
pour la femme
La loi autorisant l'avortement n'existe que depuis la fin du XX e.
Certains partis d'extrême droite ou cathos espèrent d'ailleurs la
faire abroger, comme les USA l'ont fait en 2022.
Qui était le père ? Peu de traces de ces géniteurs. Subornation d'une
servante, viol lors de passage de troupes, amourette sans lendemain,
rien n'est dit sauf en de rares cas.
Le curé parfois se déchainait contre la "pécheresse". En voici un
exemple particulièrement intéressant à Ollé (28). Il s'agit de la
naissance de Martin Sence.
"Martin fils illégitime de plusieurs pères puisque tout le monde y
était bienvenu de Marie Sence la mère lequel est né de ses impurs
embrassements le lundi 7 ème jour de septembre 1671 etc.". (AD28 Ollé
1668-1693 64/301)
En 1556 un édit (qui fut relu en 1708 et 1740 et jusqu'en 1786 au prône
des messes
paroissiales) faisait obligation aux femmes célibataires ou veuves de
déclarer leur grossesse. Cet édit considérait également l'avortement ou
l'infanticide comme un meurtre.
Ci-dessus un certificat établi par le curé de Saunay (38) qui prouve
qu'il a bien rappelé à ses ouailles l'édit d'Henri II
Ces déclarations de grossesse ont quasiment disparues au XIX ème.
On trouve dans l'état civil, des reconnaissances d'enfant faites par
la mère. C'est tout simplement pour passer d'une filiation de fait à
une filiation de droit. L'enfant peut alors hériter de sa mère.
Elles sont parfois tardives quand un mariage le nécessite ou la
rectification d'un nom.
Les abandons
Ci-dessous un tour d'abandon qui était fixée dans un mur et qui
pouvait tourner sur son axe. (Musée de Provins)
On en
connait peu à Pouilly. Il n'y avait pas de
publicité autour de ces pratiques, mais il est fort probable que
quelque filles mères en aient usé.
On trouvait auprès des d'établissement tenus par des religieuses ce
qu'on appelait des tours.
Ces tours permettaient de déposer un enfant sans être reconnu par la
sœur "tourière" qui le récupérait.
C'était sans doute en dernier recours que ces femmes en arrivaient là
et il n'était pas rare de trouver sur l'enfant quelques signes d'amour,
comme un petit mot mal écrit, une croix ou autres.
L'avenir de ces enfants était des plus sombres et la mortalité dans ces
établissements étaient épouvantables.
On trouve à Pouilly ce cas :
Marie X le 12/07/1725
"...je, Henry Blanchot prêtre et curé de Pouilly soussigné ay en
présence du procureur fiscal en la justice de ce lieu baptisé
conditionnellement une fille trouvée en cette paroisse dont le père et
la mère sont inconnues. Laquelle est âgée d'environ sept mois à
laquelle on a imposé le nom de Marie, laquelle a été baptisée sous
condition parce qu'il n'a été trouvé sur elle aucune marque ni écrit
qui puisse faire présumer ou croire que le sacrement de baptême eut été
administré. Son parrain le Jean Grincourt greffier en cette justice et
la marraine Marie Thomas sa femme qui ont signé avec le procureur
fiscal en la minute des présentes" (AD55 1723-1759 22/267)
Et un entre autres, à Stenay,
Joseph
Antoine Quentin dont le fils (Quentin Jean-Baptiste
1851-1930, décéda à Pouilly, marié à Elizabeth Zélie Guichard.
C'est pour cette raison que je le cite :
"...est comparue Dame Thérèse André, supérieure et économe de l'hospice
civil de cette ville, laquelle nous a déclaré qu'il avait été apporté
audit hospice par la sage femme de cette ville un enfant du sexe
masculin né de ce jour, lequel était enveloppé d'un lange de droguet
bleu rayé, une bande de la même étoffe avec une croix blanche à un
bout, un bonnet d'indienne moucheté rouge avec une petite dentelle
blanche doublé de grosse toile, un autre petit bonnet de toille à deux
(?) deux drapeaux et une petite chemise à gorgère, et qui a été baptisé
audit hospice sous les noms de etc."
On voit que la mère a pris soin de l'enfant avant de devoir
l'abandonner.
Ce dernier survécut à ce mauvais départ dans la vie. En 1850 il était
sabotier et marié à Marie Joséphine Lallement, le 10/11/1850 à La
Ferté-sur-Chiers, dont le père Gérard Lallement était décoré de la
légion d'honneur.
Ci-contre la porte d'un tour d'abandon à Sedan.
Si cette pratique a disparu en France par une loi du 27/06/1904, il
faut tout de même savoir
qu'une dizaine de pays en Europe l'ont remise au goût du jour, dont
l'Italie, la Suisse, la Pologne etc. (Le Monde du 11/06/2012)