La fabrique
Drôle de nom pour ce qui a trait à la logistique de la paroisse. Mais en voici la définition exacte :
"Ce terme désigne à la fois le temporel d'une paroisse, c'est-à-dire
ses biens et ses revenus, et l'organisme chargé de le gérer. Celui-ci
est constitué d'une ou plusieurs personnes, généralement élues par les
paroissiens, simples procureurs fabriciens dans les paroisses rurales
ou corps de marguilliers et fabriciens dans les paroisses urbaines.Les
biens de la fabrique, considérés comme biens d'église, sont
inaliénables. Ils sont constitués de biens extérieurs, maisons, terres
affermées, cens en argent ou en nature, rentes provenant le plus
souvent de donations anciennes, et de biens intérieurs, casuel, quêtes
et offrandes, location des bancs, prix fixé pour l'utilisation des
cloches, tentures et ornements. Plus ou moins importants selon les
paroisses, ces revenus servent à entretenir en partie les églises et à
couvrir les frais du culte. Les comptes de fabrique, longtemps fort
négligés, sont surveillés de plus en plus rigoureusement depuis la fin
du XVIIe siècle par les représentants de l'administration diocésaine au
cours de leur visite. Le gouvernement royal s'en préoccupe également et
multiplie les règlements à la fin du XVIIIe siècle. Les contestations
sur les comptes-rendus par les fabriciens se règlent devant les
tribunaux royaux.".
"Lexique historique de la France d'ancien régime" Guy Cabourdin et Georges Viard. Armand Colin Isbn 2-200-32123-6.
Il fallait donc rendre des comptes et Fulgence Richer nous signale que :
"Le 13/03/1646, Arrêt du parlement portant défense à tous marguilliers,
échevins et autres administrateurs du revenu des églises et paroisses
de Mouzon, Stenay, Jametz, Château Regnault et lieux qui en dépendent,
de faire aucun festin ni repas à la reddition de leurs comptes... à
peine de 500 livre d'amende...".
Denain, tome 2 page 365 en fait aussi état. Voilà qui en dit long.
Le fonctionnement des fabriques n'a pas changé jusqu'à la fin du XVIII ème.
Elles furent mises à mal lors de la révolution, mais rétablies
par le concordat de 1801. Leur fonctionnement est précisé par le décret
du 30/12/1809 qui en fait des établissement publics du culte.
Un conseil de fabrique est formé et si le maire et le curé sont membres
de droit, il leur est adjoint 5 conseillers choisis parmi les
notables qui doivent être catholiques et domiciliés dans la paroisse.
Trois sont nommés par l'autorité épiscopale et deux par le préfet du
département. Le conseil de fabrique élit un président et un secrétaire
et nomme les membres du bureau.
Le conseil de fabrique se réunit régulièrement et particulièrement le
jour de la Quasimodo. Le fonctionnement ressemble à celui d'une
association de loi 1901.
L'article 1er énumère les tâches qui reviennent au conseil de fabrique
: l'entretien et la conservation de l'église, la gestion des aumônes,
des biens, des rentes etc.
Voici un résumé de l'article de Mathilde Guilbaud intitulé "Les
fabriques paroissiales rurales au XIX ème siècle", paru dans "Histoire
et sociétés rurales" 2007/2 page 306 :
Au xixe
siècle, la fabrique paroissiale est une institution complexe,
puisqu'elle relève à la fois de l'administration civile et de l'autorité
ecclésiastique. La renaissance des fabriques participe non seulement de
la logique concordataire de contrôle des cultes par l'État, mais aussi
de l'entreprise de maillage administratif du territoire. Jusqu'en
1870-1880, la fabrique est liée à l'administration municipale, qui
finance largement l'entretien de ce monument de la fierté villageoise
qu'est le clocher de l'église. Sous la Troisième République les
fabriques sont progressivement considérées avec méfiance par des
municipalités désireuses de se dégager de l'emprise de l'Église. Le
durcissement de la réglementation révèle la fragilité d'une institution
dominée par le curé. La loi de séparation des Églises et de l'État
consacre la disparition des fabriques paroissiales, elles sont
remplacées par des institutions largement dominées par l'autorité
ecclésiastique.
Le 01/12/1828 un état estimatif est soumis au conseil municipal, pour
l'achat d'ornements jugés nécessaires à la décence du culte. Il se
monte à 400 francs et en voici le détail :
9 surplis mousseline claire et la façon des dits surplis.
8 soutanelles serge rouge et leur façon.
Ornements verts pour la fête patronale.
Livres de chants
Livre de mort
2 bonnets quarrées (sic)
Après examen des comptes de la fabrique, la municipalité vote les 400
francs. Parmi les signataires on trouve Gand curé de Pouilly.
C'est Pierre Deleau, tailleur demeurant à Pouilly qui s'engage le 28/12/1828 à la réalisation de ces ornements.
Le 08/06/1875 le président met sous les yeux du conseil municipal le
budget de la fabrique de l'église de Pouilly, duquel il résulte que le
conseil de fabrique demande à la commune un vote de 2 305,75 francs
pour réparations à l'église et au presbytère.
Les membres prèsents considèrant que les réparations au presbytère sont
indispensables ainsi que celles à faire à l'église, votent pour les
réparations dont il s'agit la somme de 2300 francs à la condition
expresse que les devis des travaux seront dressés par un achitecte et
que des adjudications seront passées pour leur exècution.
Le 06/02/1886
Le budget de la fabrique de Pouilly, nous est connu dans ses grandes
lignes pour l'année 1896. Il est signé Alfred Gilles curé du village.
Recettes 699 00 fr
Dépenses 695 60 fr
Excèdent 3 40 fr
Comme au 31/12/1895 il existait un excèdent du précèdent exercice de
351 55, que les recettes étaient de 735 40 et les dépenses de 802 55,
Le nouvel excèdent est de 284 40 fr.
Les marguillers, marliers, ciriers etc. de la fabrique
Jean Barbaise (ca 1640- >1691) est marlier et signe une quantité d'actes quand Josseteau était curé.
Jean Mazelot et
Jean Potier
sont marguillers quand le 12/12/1714 ils acceptent le contrat de
donation de 9 verges de vignes appartenant à Pierre Neveux. Ce dernier
les donne à la fabrique sous condition d'une messe annuelle à
perpétuité. (AD55 L400).
Jean Lambert décède le 01/04/1768, âgé d'environ 37 ans. Il était marguiller receveur de la fabrique. (AD55 1760-1791 94/345).
Michel Aubry (1726-02/02/1814)
échevin en la haute justice de Pouilly est aussi cirier. Il lui
appartient donc de confectionner les bougies et autres chandelles pour
l'église. (AD55 1760-1791 111/345)
Valérien Oudard et
Pierre Habran sont marguillers quand ils signent le procès-verbal de
visite épiscopale de
1747,
faite par Hyacinthe Le Blanc. Valerien Oudard est né à Brouennes le
09/06/1713 et décédé à Pouilly le 01/12/1781. Il était vigneron mais
fut aussi maire et juge en la haute justice de Pouilly en 1766.
Quant à Pierre Habran, c'est sans doute un fils de Jean Habran et
Alexis Guichard. Mais il y en avait deux... nés en 1716 et 1721.
Jean Baptiste Durlet était chantre en 1770, (AD55 1760-1791 116/345)
Les dons connus à la fabrique de Pouilly :
Henry le Faron curé, avait fondé pour lui un anniversaire au 5 février, pour lequel il
avait donné à la fabrique un calice d'argent doré avec la patène, un
écrin couvert de soie et garni de fil d'argent doré, la boîte aux pains
de même parure et une chasuble de damas rouge.
Aubertin Guyard curé,
légua à la fabrique cinquante
francs barrois pour le fonds d'un anniversaire fixé au 17 novembre.
Valérien Colin curé, en 1654, s'opposa juridiquement, de concert avec le
marguiller de la fabrique à une vente d'immeuble, afin de récupérer la
somme de cent francs barrois de fondation faite par Madame de Boncourt,
dont les derniers avaient été touchés par Guyard doyen de Mouzon et
curé de Pouilly.
Garlache d'Assenois
curé, Sur le cartulaire et comptes de la fabrique, on pouvait lire "...
légua à la fabrique plusieurs cens (ici le mot cens est employé comme synonyme de rente) assis sur un cens de terre au
montant de la croix, sur un cens du pré la terre, sur deux maisons de
la rue de la cure et sur deux autres de la rue haute. A charge d'un
anniversaire qui doit s'acquitter la 14 novembre pour lui et pour
Guillaume de Pouilly, prêtre qui vivait encore en 1567."
Charles Josseteau curé, par son testament olographe du 25/04/1696, donna à l'église de
Pouilly un soleil d'argent, un contrat de constitution de 1025 livres
pour entretenir à perpétuité la lampe allumée devant le saint
sacrement, une fauchée de pré dans la contrée des prés aux agneaux, un
demi-cent dans celle du pré la Serre et vingt verges de vigne au milieu
du vignoble pour la fondation d'une messe haute le jour de la fête de
saint-Charles, d'un anniversaire le lendemain pour le repos de son âme,
d'une autre le 20 février, jour de la saint-Guillaume pour son père, sa
mère, ses frères et ses sœurs, enfin un troisième le jour de son décès
qui arriva le 11 janvier 1698.
(tiré des titres de la fabrique)
Jean Bourgain curé, sur son testament du 25/01/1736, légua à la fabrique de Pouilly, la
somme de 200 livres à charge d'une messe basse le jour de sa mort.
Henri Blanchot curé, le 20 septembre 1744, avait fait un testament olographe par lesquels
entre autres legs pieux, il donna à la fabrique de Pouilly :
1 - Un demi cens de pré à la Corberelle, quarante verges à la
Grand-mère, onze verges de vignes à Belair, à charge d'un anniversaire
perpétuel pour le jour de son décès.
2 - La maison d'école "à condition que le maître enseignera
gratuitement de pauvres enfants dont le choix et le nombre est laissé à
la disposition des curés ses successeurs et qu'il payera à la fabrique
le surplus de location.".
La fabrique recevait aussi des dons de la part de particuliers.
Le 12/12/1714 Pierre Neveux, en fait Pierre Nepveux (ca
1632-15/09/1725) "...cède et abandonne dés à présent et pour toujours à
la fabrique de Pouilly neuf verges de vigne appartenantes et venantes
audit Pierre Neveux de son propre et situées audit vignoble de Pouilly
en lieu dit la Cote royé vers l'orient Jean Graincourt fermier de la
Vuame et le dit Pierre Neveux vers l'occident qui a engagé tous ses
biens prèsens et avenirs pour faire valoir et garantir à la ditte
fabrique la ditte donation a condition qu'il sera dit et célébré en
l'église de Pouilly annuellement et à perpétuité le deuxième de may si
faire se peut ou un autre jour un anniversaire de messe haute vigile à
trois lecons et recommandise pour le repos des âmes de Jacques et de
Pierre les Neveux et de leurs femmes qui sera annoncé le dimanche
précèdent et écrit à la table des anniversaires de la ditte fabrique.
Le dit Pierre Neveux a désiré en abandonnant lesdites neuf verges de
vigne à la fabrique de Pouilly qu'elle les donne en louage pour quatre
vingt dix neuf ans à Jean Lecuyer vigneron audit lieu afin qu'il ait
soin de les bien entretenir et d'en rendre chaque année a laditte
fabrique quatre livres sans prétendre aucune diminution; ce qui a été
accepté par Henry Blanchot curé et Jean Mazelot et Jean Potier le jeune
marguilliers au nom et pour laditte fabrique; fait et passé en la
maison curialle dudit lieu de douzième décembre mil sept cent quatorze
etc."
Suivent le nom des signataires.
Voilà un document certes long, mais qui est tout à fait typique d'une donation. (AD55 L400)
Une ordonnance du roi autorise l'acceptation d'une pièce de terre
offerte en donation par les sieur et demoiselle
Lambert, frère et sœur,
à la fabrique de Pouilly. (Bulletin des lois.Ordonnance no 8037 Paris
27/10/1819).
Sans les prénoms il n'est pas possible d'identifier ces donateurs.
Une veuve
Dubois, née Balland, par testament olographe du
23/07/1903, donne une somme de 3000 francs à charge d'entretenir sa
tombe à perpétuité. Et c'est dûment enregistré par le Ministère de
l'intérieur et des cultes. (Arch. évêché de Verdun).
Je n'ai pas retrouvé sa tombe au cimetière de Pouilly.
La fabrique faisait aussi des placements.
Le 22/01/1853, le conseil de fabrique souhaite placer 250 francs venant d'un leg, en rente de l'état.
La même année le 16/11/1853, il veut faire l'acquisition de 400 francs de rente de l'état.
Un courrier du 27/05/1854 de
la préfecture de la Meuse à destination de l'évêché, nous apprend que la
fabrique de Pouilly a placé en rentes sur l'état une somme de 600
francs.
Ces placements n'empêchent pas la fabrique de solliciter de l'aide
auprès de la mairie de Pouilly. Elle demande 555,79 francs pour couvrir
le déficit du budget de l'année 1854. Le préfet lui fait remarquer que
ces 555,79 francs de déficit se résument à 15,79 francs, si 540 francs
provenant de capitaux employés illégalement et grevés de service
religieux, sont pris en compte.
Il précise bien à l'évêque de Verdun que : "C'est donc pour rétablir ces
capitaux illégalement détournés de leur destination que la fabrique
sollicite une subvention communale. Or les dépenses qui constituent le
déficit dont il s'agit n'étant point obligatoires, je ne saurais
contraindre la commune à les couvrir".
On ne sait pas ce qu'étaient ces dépenses illégales.
(Bib diocèse de Verdun)
L'étude de 1902
On connait l'état de la fabrique par une étude lancée en 1902 sur les
paroisses du diocèse et retrouvée à la bibliothèque diocésaine de Verdun.
Le rédacteur de cette étude est le curé
François Alfred Gilles.
Il confirme que la fabrique est financée par des fondations, mais hélas ne nous renseigne pas sur son budget.
La caisse se trouve dans la chambre du curé et comporte 3 clés.
Il existe un registre sommier des fondations, un registre des délibérations, un registre ou vieux cahier relatant les baptêmes,
mariages, sépultures depuis le commencement du XIX ème.
Les registres antérieurs font parti des archives communales. (Hélas tout a disparu dans l'incendie de la mairie en 1917)
L'inventaire et les locations de la fabrique
Nous connaissons celui de 07/03/1792.
En voici la première page.
Pour en voir l'intégralité c'est sur ce
diaporama fabrique
La fabrique était donc une entreprise qui à défaut d'être riche, n'était pas dans le besoin.